Le Rapporteur — Perspectives 2023

UNE APPROCHE RÉALISTE PORTEUSE D’ESPOIR

Connaissez-vous le film Le Projet Blair?

Sorti en salle en 1999, ce film d’horreur a connu un succès phénoménal, récoltant quelque 250 millions de dollars de recettes. Il est ainsi devenu l’un des longs métrages les plus rentables de l’histoire, comme son budget était d’environ 60 000 $. Il raconte les péripéties de trois étudiants en cinéma qui veulent produire un documentaire sur la légendaire sorcière de Blair. Ce qui est étonnant, c’est qu’au lieu de tomber dans le cliché en recourant à des personnages effrayants et à des effets spéciaux, les réalisateurs ont plutôt misé sur la tension psychologique et l’imagination du spectateur. Le résultat est convaincant puisque nous sommes tenus en haleine du début à la fin.

Pour faire un parallèle avec les marchés financiers, nous pouvons sans aucun doute tirer une leçon de cette réussite cinématographique : la menace imminente d’une récession fait craindre le pire à de nombreux investisseurs qui ressentent du stress et de l’anxiété. Tout comme dans un film d’horreur, l’anticipation d’un scénario économique défavorable a souvent un impact psychologique plus important que celui associé à sa concrétisation. En effet, en étant confrontés à une possible récession, notre premier réflexe est souvent d’envisager une situation comparable à celle de la crise financière de 2008. Or, il existe différents types de récession, dont certains n’impliquent pas nécessairement de débâcle boursière d’importance. À cet égard, saviez-vous que l’économie canadienne est tombée en récession en 2015?

Aujourd’hui plus que jamais, nous devons nous efforcer de conserver notre présence d’esprit en faisant continuellement preuve de discipline. Pour ce faire, l’analyse de scénarios s’avère fort utile, un exercice que nous avons fait en collaboration avec Jimmy Jean, économiste en chef et stratège chez Desjardins. La bonne nouvelle est que nous attribuons une probabilité élevée à la survenue de l’un de ces deux scénarios : un atterrissage en douceur de l’économie ou une récession légère. Voici une présentation sommaire de nos trois scénarios pour la croissance économique avec les probabilités de réalisation correspondantes entre parenthèses.

No 1 : Atterrissage en douceur de l’économie (15 %)

Afin de contrer la hausse marquée de l’inflation, les banques centrales ont multiplié les hausses de taux d’intérêt à très court terme. Au Canada et aux États-Unis, les taux directeurs sont respectivement de 4,50 % et 4,75 %. Dans ce scénario des plus optimistes, les banques centrales parviennent à passer le KO (knock-out) à l’inflation. Cela veut dire que le taux d’inflation annuel tend rapidement vers son niveau cible de 2 %, ce qui donnerait toute la latitude voulue aux banques centrales pour réduire leur taux directeur en fin d’année. Pendant ce temps, l’économie demeure résiliente vu la vigueur du marché de l’emploi et la bonne posture financière du consommateur. Ceci est la conséquence heureuse de l’épargne excédentaire accumulée pendant la crise sanitaire à la suite de la mise en place d’une batterie de mesures et de politiques budgétaires qui permet de composer avec le plein effet des hausses cumulées des taux d’intérêt.

No 2 : Récession légère (60 %)

Ici, contrairement au scénario précédent, la baisse de l’inflation se matérialise, mais à un rythme beaucoup plus lent. Les banques centrales n’ont alors d’autre choix que de maintenir le cap sur leur politique monétaire restrictive. Dès lors, l’économie commence à montrer des signes d’essoufflement de plus en plus marqués, particulièrement la détérioration du marché de l’emploi et la réduction de l’épargne excédentaire qui entraînent une croissance mitigée, voire négative des bénéfices des entreprises. Sachant que le meilleur remède à l’inflation est la récession, ce passage à vide pourrait être de courte durée. En fait, un ralentissement généralisé de l’activité économique ouvrirait donc la porte à une baisse graduelle des taux directeurs en 2024. Si jamais cela se concrétise, il est à noter que nous prévoyons des taux d’intérêt à long terme qui resteront relativement stables compte tenu de la relance économique qui pourrait s’ensuivre advenant un assouplissement de la politique monétaire.

No 3 : Récession profonde (25 %)

Le délai de transmission désigne le temps nécessaire pour qu’une hausse du taux directeur ait une incidence néfaste sur l’économie. Par exemple, le resserrement de la politique monétaire frappe d’abord le secteur immobilier (culmine après 4 à 6 mois) tandis que l’impact négatif sur les dépenses de consommation tarde à se manifester (culmine après 8 à 14 mois). Comme nous avons assisté à un relèvement précipité des taux d’intérêt au cours de la dernière année, le risque d’une contraction plus prononcée de l’économie n’est pas négligeable à court terme. Il est bon de rappeler que les dépenses de consommation constituent près de 70 % de l’économie.

Dans un tel scénario, le marché de l’emploi est davantage affecté, le bas de laine du consommateur fond comme neige au soleil et les bénéfices des entreprises sont sous pression. En réaction, l’inflation chute radicalement vers son niveau cible de 2 % et les banques centrales ajustent le tir en diminuant rapidement les taux directeurs (politique monétaire expansionniste).

NOTRE GESTION DE PORTEFEUILLE

À la lumière de ce qui précède, la récession semble presque inévitable, conformément au signal d’alerte émis par notre modèle prévisionnel en septembre dernier. Cela étant dit, nous ne sommes pas forcément pessimistes en ce qui a trait aux perspectives de rendement. D’une part, étant donné la récente contraction des ratios cours/bénéfice, l’évaluation boursière est plus raisonnable qu’à pareille date l’an dernier. D’autre part, selon notre outil quantitatif pour guider nos décisions d’investissement, les titres du portefeuille Croissance ont un potentiel de rendement moyen estimé à 62 % sur une période de cinq ans. C’est pourquoi nous sommes plutôt dans le camp des réalistes. Pour en savoir davantage sur ce sujet, nous vous invitons à visionner l’enregistrement de notre conférence annuelle intitulée Les marchés financiers en 3D.

Cet état d’esprit se reflète dans notre posture plus tactique en fonction des seuils extrêmes du S&P 500, comme nous l’avons décrit dans nos deux dernières lettres financières. Depuis l’été dernier, le principal indice de référence américain se promène grosso modo entre 3 600 et 4 300 points. Cela s’explique par l’incertitude liée à la normalisation de l’inflation, au risque de récession, à la croissance des bénéfices des entreprises ainsi qu’aux agissements des banquiers centraux.

En considérant que le S&P 500 se négocie dans le haut de son couloir transactionnel, nous en avons profité pour réduire notre exposition en actions ordinaires dans nos modèles de gestion. Par exemple, pour le portefeuille Croissance, le niveau de liquidité est de 12 % alors qu’à l’intérieur du portefeuille Équilibré fiscal, le volet Croissance est établi à 50 %. D’ailleurs, dans la section Annexe, vous trouverez un sommaire des transactions effectuées dans le portefeuille Croissance en 2023.

Ainsi, nous sommes bien positionnés pour profiter d’éventuelles occasions d’investissement tout en misant sur la préservation du capital, une sage décision dans le contexte actuel. C’est donc une approche réaliste porteuse d’espoir pour générer de la valeur ajoutée!

ANNEXE

TITRE TYPE DE TRANSACTION
AmerisourceBergen (ABC) Vente partielle
McKesson (MCK) Vente partielle
Brookfield Asset Management (BAM/A) Vente totale
ZUB (Fonds équipondéré en banques américaines couvert en dollars canadiens) Vente totale

Veuillez noter que la transaction de vente de Brookfield Asset Management Ltd. découle de la scission partielle de la société de gestion d’actifs qui a eu lieu en décembre dernier via un Plan d’arrangement. Effectivement, nous avons liquidé la portion attribuée à la gestion des investissements alors que nous avons conservé l’entité Brookfield Corporation en lien avec la détention des actifs réels et le déploiement de capital au sein des entreprise en opération visant ainsi la consolidation du capital à long terme. Ce dernier se négocie à la Bourse de Toronto sous le symbole BN.

Chacun des conseillers de Valeurs mobilières Desjardins (VMD) dont le nom est publié en page frontispice du présent document ou au début de toute rubrique de ce même document atteste par la présente que les recommandations et les opinions exprimées aux présentes reflètent avec exactitude les points de vue personnels des conseillers à l’égard de la société et des titres faisant l’objet du présent document ainsi que de toute autre société ou tout autre titre mentionné au sein du présent document dont le conseiller suit l’évolution. Il est possible que VMD ait déjà publié des opinions différentes ou même contraires à ce qui est ici exprimé. Ces opinions sont le reflet des différents points de vue, hypothèses et méthodes d’analyse des conseillers qui les ont rédigées. Avant de prendre une décision de placement fondée sur les recommandations fournies au présent document, il est conseillé au receveur du document d’évaluer dans quelle mesure celles-ci lui conviennent, au regard de sa situation financière personnelle ainsi que de ses objectifs et besoins de placement.

Haut de page