Le Rapporteur — Deuxième trimestre de 2019

À quoi se fier : au marché boursier ou à l’économie?

Prenez connaissance des informations suivantes :

  • Les États-Unis ont rompu les négociations avec la Chine en augmentant à 25 % les droits de douane punitifs sur des marchandises chinoises représentant quelque 200 milliards de dollars d’importations annuelles1 ;
  • La production industrielle de la Chine a enregistré sa plus faible progression sur une base annualisée en 17 ans2;
  • L’indice manufacturier allemand est à son plus bas niveau depuis 20123 ;
  • La Banque du Canada s’attend à une croissance du PIB réel de 1,2 % en 2019, une baisse par rapport à sa prévision de janvier (1,7 %)4. De plus, le service de la dette en pourcentage du revenu disponible des ménages canadiens a atteint 14,9 %, ce qui constitue un nouveau record5 ;
  • Aux États-Unis, les analystes financiers prévoient une hausse modeste de 2,8 % du bénéfice annuel du S&P 500 en 20196.

En vous fiant uniquement à cette liste, croyez-vous que les principaux indices de référence seront à la hausse ou à la baisse cette année? Vous choisirez probablement la deuxième option. Or, ils ont enregistré des rendements qui se situent entre 10 et 20 % ! Mais qu’est-ce qui explique un tel résultat, malgré les signes de plus en plus évidents d’un ralentissement économique mondial?

Pour répondre à cette question, nous allons nous appuyer sur le contraste dynamique, un concept tiré de l’industrie de l’alimentation. Pour nous faire vivre une expérience de goût agréable, certains aliments procurent différentes sensations en bouche. On n’a qu’à penser au chocolat à la fleur de sel ou à un gâteau croustillant à l’extérieur et moelleux à l’intérieur. En jouant avec les saveurs et les textures, il est possible de trouver le juste équilibre. Ce principe est à la base du succès de la crème brûlée, de la pizza et du biscuit Oreo7.

Pour l’investisseur, la leçon à tirer est donc la suivante : la recette gagnante consiste à utiliser un style de gestion qui vous convient (l’aspect du marché boursier) et à observer la tendance des taux d’intérêt dictée par les banques centrales (l’aspect du marché obligataire). C’est la combinaison de ces deux « ingrédients » distincts qui permet de créer de la valeur ajoutée à long terme.

Faits saillants du deuxième trimestre

Au début de l’année, on a demandé à 50 économistes de fournir leur projection quant au niveau du taux d’intérêt de 10 ans américain à la fin du premier semestre. La prévision moyenne était de 3,39 %8, ce qui est très loin du 2 % observé le 28 juin. Que s’est-il passé ?

Dans notre Rapporteur du premier trimestre de 2019, nous avons insisté sur le fait que les principales banques centrales prônaient le statu quo au chapitre de leur politique monétaire. En effet, Mario Draghi, président de la Banque centrale européenne (BCE), avait alors mentionné que le taux directeur demeurerait inchangé au moins jusqu’en 2020 et la Réserve fédérale américaine ne prévoyait aucune hausse de taux d’intérêt en 2019. Or, à la mi-juin, tout a changé.

En effet, Mario Draghi a alors déclaré que la BCE était sur le point de réduire le taux directeur et de relancer le programme d’achat d’obligations pour stimuler une économie européenne qui battait de l’aile9. Le lendemain, la Réserve fédérale américaine s’est aussi dite prête à diminuer le taux directeur en vue de favoriser la croissance économique américaine. Selon le CME FedWatch Tool, au 5 juillet 2019, les participants du marché obligataire évaluaient à 36 %10 la probabilité que la Fed abaisse le taux directeur à trois reprises d’ici la fin de l’année, alors qu’il se situe actuellement à 2,5 %.

Sans surprise, ce changement de cap a incité une prise de risque sur l’ensemble des actifs financiers. À titre d’exemple, sur le plan de la performance, le S&P 500 a connu son meilleur mois de juin depuis 195511, l’or s’est négocié à son plus haut niveau en six ans et même le cours du bitcoin s’est envolé au-delà de 10 000 dollars! Peu importe l’issue du confit commercial sino-américain ou la dégradation certaine des conditions économiques, la communauté financière est d’avis que les banques centrales feront tout en leur pouvoir pour soutenir le système financier. Le secret réside donc dans la compréhension du marché des actions et des obligations (principe du contraste dynamique).

Sommaire des rendements — Premier semestre

Indice de référence Rendement
(converti en $ CA)
S&P 500 13,92 %
S&P/TSX 16,19 %
MSCI World 12,81 %
MSCI EAFE 10,06 %
FTSE TMX Canada Universe Bond 6,52 %

 

Indice de référence Rendement
(calculé en $ US)
Or 9,06 %
Pétrole 28,76 %

Revue de performance — Premier semestre

  Rendementdu portefeuille (A) Rendement de l’indice
de référence (B)
Alpha (C) = (A) – (B)
Obligataire 1,07 % 6,52 % -5,45 %
Actions privilégiées -2,68 % -0,94 % -1,74 %
Croissance 5,04 % 14,45 % - 9,41 %
Équilibré fiscal* 2,08 % 8,54 % -6,46 %

* Le rendement est calculé à partir d’un compte client et ne tient pas compte des frais de gestion. Le rendement réel peut varier en fonction du moment de l’investissement. La répartition de l’indice de référence est la suivante : 25 % S&P/TSX, 25 % MSCI World, 25 % Indice d’actions privilégiées S&P/TSX et 25 % Indice obligataire FTSE TMX Canada Universe Bond pour le portefeuille équilibré fiscal. L’indice de référence du portefeuille Croissance est 50 % S&P/TSX et 50 % MSCI World, celui du portefeuille obligataire est 100 % FTSE TMX Canada Universe Bond, et celui du portefeuille d’actions privilégiées est 100 % Indice d’actions privilégiées S&P/TSX.

Notre gestion

Comme vous le savez, depuis quelque temps, nous privilégions une gestion de portefeuille plus défensive. Selon ce qui précède, devrions-nous la modifier pour accroître notre prise de risque? La réponse est non. Bien que l’impact des banques centrales sur le sentiment des investisseurs soit non négligeable, nous croyons qu’un environnement de taux d’intérêt faibles traduit plutôt un risque de récession élevé. En plus du signal d’avertissement émis par notre modèle de prévision et de l’inversion de la courbe des taux d’intérêt aux États-Unis, une version améliorée du modèle de la Réserve fédérale américaine révèle que la probabilité d’une récession chez nos voisins du Sud au cours des 12 prochains mois est de 64 %. C’est le plus haut pourcentage depuis décembre 2007 (85 %), le mois qui a marqué le début de la dernière récession12. Étant donné que le S&P 500 a perdu en moyenne 29 % lors des récessions qui se sont produites après la Deuxième Guerre mondiale13, la préservation de votre capital est notre priorité.

Compte tenu de l’écart de performance qui existe entre nos portefeuilles et les indices de référence correspondants, il serait tentant de céder à la pression en se ralliant à l’opinion du marché boursier, qui montre un optimisme marqué. Or, d’une part, pour un gestionnaire de portefeuille, les périodes de sous-performance sont fréquentes, surtout à court terme. Par exemple, saviez-vous que l’action de la société d’investissement Berkshire Hathaway (le bébé de Warren Buffett!) s’échange sensiblement au même niveau qu’au début de 2018?

D’autre part, vu le caractère imprévisible du marché boursier, il est normal de le voir se comporter différemment de l’économie. Toutefois, tôt ou tard, cette dernière aura préséance. Pour mieux saisir ce point, rien de mieux que l’analogie d’une personne qui promène son chien en laisse14 : durant le trajet, le chien (marché boursier) peut s’éloigner de son maître (l’économie) s’il est distrait par un autre animal; par contre, en fin de compte, les deux arriveront à destination en même temps, car c’est le maître qui tient les rênes. Selon nous, ce n’est qu’une question de temps avant que les marchés boursiers ne reflètent la réalité d’une économie mondiale au ralenti.

Nous invitons ceux et celles que cela intéresse à visionner cette vidéo - Lien externe au site. S’ouvre dans une nouvelle fenêtre qui résume bien notre propos.

 

Sources :

Batnick, M. (2019). More Art Than Science. The Irrelevant Investor - Lien externe au site. S’ouvre dans une nouvelle fenêtre.
Consulté en juillet 2019

Brown, J. (2019). The Stock Market vs The Economy. CNBC - Lien externe au site. S’ouvre dans une nouvelle fenêtre.
Consulté en juillet 2019

Capital (2019). Allemagne   L’indice PMI manufacturier au plus bas depuis août 2012 - Lien externe au site. S’ouvre dans une nouvelle fenêtre.
Consulté en juillet 2019

Carlson, B. (2019). The Upside of a Recession. A Wealth of Common Sense
Consulté en juillet 2019

CME Group (2019). CME FedWatch Tool - Lien externe au site. S’ouvre dans une nouvelle fenêtre.
Consulté en juillet 2019

Colombo, J. (2019). Current U.S. Recession Odds Are The Same As During ‘The Big Short’ Heyday. Forbes - Lien externe au site. S’ouvre dans une nouvelle fenêtre.
Consulté en juillet 2019

Cox, J. (2019). Company earnings look like they will keep sliding through the third quarter. CNBC
Consulté en juillet 2019

Cuny, D. (2019). BCE : Draghi évoque une baisse des taux, Trump peste contre l’euro faible. La Tribune
Consulté en juillet 2019

Ehret, L. et Ricci, S. (2019). La Chine réplique aux États-Unis avec des droits de douane punitifs. TVA Nouvelles
Consulté en juillet 2019

Heath, T. (2019). Stocks finish best June in decades, capping strong first half in 2019. The Washington Post
Consulté en juillet 2019

La Presse Canadienne (2019). L’économie s’est contractée. Le Devoir - Lien externe au site. S’ouvre dans une nouvelle fenêtre.
Consulté en juillet 2019

Rangasamy, K. (2019). Le mensuel économique. Banque Nationale du Canada - Lien externe au site. S’ouvre dans une nouvelle fenêtre.
Consulté en juillet 2019

Reuters (2019). Chine : Plus fort ralentissement de la production en 17 ans. L’usine nouvelle - Lien externe au site. S’ouvre dans une nouvelle fenêtre.
Consulté en juillet 2019

Whiterly, S. (1999). Why Humans Like Junk Food.iUniverse Inc.Publishing Lincoln.

  1. Ehret et Ricci (2019)Return to footnote 1 referrer
  2. Reuters (2019)Return to footnote 3 referrer
  3. Capital (2019)Return to footnote 5 referrer
  4. La Presse Canadienne (2019)Return to footnote 7 referrer
  5. Rangasamy (2019)Return to footnote 9 referrer
  6. Cox (2019)Return to footnote 11 referrer
  7. Whiterly (1999)Return to footnote 13 referrer
  8. Batnick (2019)Return to footnote 15 referrer
  9. Cuny (2019)Return to footnote 17 referrer
  10. CME Group (2019)Return to footnote 19 referrer
  11. Heath (2019)Return to footnote 21 referrer
  12. Colombo (2019)Return to footnote 23 referrer
  13. Carlson (2019)Return to footnote 25 referrer
  14. Brown (2019)Return to footnote 27 referrer

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