Le Rapporteur - le contre-choc pétrolier

En décembre 2015, malgré la forte baisse des cours du pétrole et une surabondance de l’offre, l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) a décidé d’augmenter sa production quotidienne. Celle-ci représentant le tiers de la production mondiale, les marchés ont très mal réagi, ce qui a fait chuter le prix du baril de West Texas Intermediate (WTI), le cours de référence du pétrole des États-Unis, de 40 à 26 $ en deux mois. Au cours de cette période, les marchés nord-américains ont reculé dans une synchronisation quasi parfaite avec le cours du WTI. Entre le début de janvier et la mi-février 2016, les prix ont évolué dans la même direction 87 % du temps.

Selon nous, plusieurs facteurs peuvent expliquer cette forte corrélation entre la performance des actions et celle de l’or noir. D’abord, les investisseurs craignent que la faiblesse persistante des prix du pétrole entraîne un ralentissement économique mondial. Ensuite, certains pays qui dépendent fortement de l’industrie pétrolière – comme la Russie, le Brésil et le Venezuela – font face à des défis importants (risque de récession, déficit budgétaire). En effet, pour le gouvernement russe, ce secteur d’activité représente la moitié de ses revenus. Enfin, un grand nombre de sociétés d’exploration pétrolière et gazière doivent composer avec un risque de défaut de paiement lié à un niveau d’endettement élevé. Selon la firme d’avocats Haynes and Boone, 36 entreprises américaines qui cumulent une dette de plus de 13 milliards de dollars ont déclaré faillite en 2015. La situation financière du secteur bancaire nord-américain pourrait donc s’affaiblir. Par exemple, d’après une étude réalisée par Charles St-Arnaud, économiste chez Nomura, les banques canadiennes ont accordé à ce type d’entreprise des prêts pour un montant de 42 milliards de dollars, soit 6 % de l’ensemble de leurs prêts commerciaux.

Un scénario semblable à celui de 1985-1986 ?

On parle de « contre-choc pétrolier » lorsque les prix du baril de pétrole baissent d’au moins 40 % sur une période d’un an. Il serait donc pertinent d’examiner les contre-chocs pétroliers passés, afin d’identifier les similitudes avec la situation actuelle. Selon Bruno Cavalier, chef économiste chez Oddo Securities, analyser l’effondrement des prix entre 1985 et 1986 s’avère fort utile aux fins d’une comparaison avec le contre-choc pétrolier actuel.

En novembre 1985, le cours du WTI se négociait à 30 $ le baril (l’équivalent de 60 $ aujourd’hui); six mois plus tard, il était à moins de 10 $. D’après Bruno Cavalier, cette débâcle boursière était due à un excès de l’offre plutôt qu’à une faiblesse de la demande causée par une crise économique. En effet, de nombreux projets d’exploitation pétrolière avaient vu le jour en mer du Nord, en Afrique de l’Ouest, au Mexique et en Alaska, augmentant ainsi la quantité de pétrole disponible.

Selon Bruno Cavalier, le portrait de la situation est aujourd’hui semblable. Dans un premier temps, la production globale de pétrole est d’environ 98 millions de barils par jour, comparativement à une consommation mondiale quotidienne estimée à 96 millions de barils, ce qui crée une offre excédentaire. Dans un deuxième temps, les réserves de pétrole sont anormalement élevées. Par exemple, à la mi-février 2016, les principales installations américaines d’entreposage de pétrole détenaient une réserve cumulée record de 500 millions de barils, soit un niveau 20 % plus élevé que celui enregistré en février 2015.

En ce qui concerne l’analyse de la demande pour le pétrole, les économistes demeurent optimistes. À titre d’exemple, la Banque Scotia prévoit un taux de croissance de l’économie mondiale de l’ordre de 3,2 % en 2016 et de 3,5 % en 2017. Les consommateurs profitent pleinement de la faiblesse des cours du pétrole. Par exemple, d’après l’U.S. Energy Information Administration, le ménage américain moyen a dépensé 1 800 $ en essence en 2015, soit une économie de 700 $ comparativement à la somme déboursée à ce chapitre en 2014. Selon Bruno Cavalier, la facture pétrolière mondiale, qui était de 3 700 milliards de dollars en 2014 (le pétrole se négociait alors à 110 $ le baril), se chiffrait à 1 700 milliards de dollars six mois plus tard, à la suite d’une baisse de 50 % de cette matière première. Ce transfert de richesse entre les producteurs pétroliers et les consommateurs est un catalyseur positif pour la croissance économique.

Notre point de vue

Depuis le début de l’année 2016, les marchés nord-américains affichent une forte corrélation (surtout à la baisse) avec le prix du WTI, ce qui illustre les craintes d’une éventuelle crise économique mondiale. Toutefois, si nous comparons ce contre-choc pétrolier avec celui de 1985-1986, nous constatons que le problème réside dans le fait que l’offre est supérieure à la demande et que les réserves de pétrole sont trop élevées, ce qui exige un ajustement des prix à la baisse. Compte tenu des prévisions économiques encourageantes, nous sommes d’avis qu’il faut être plus optimiste que pessimiste en ce qui a trait aux perspectives de rendement sur les marchés boursiers.

Sources

Anna Andrianova, “How cheap oil is squeezing Russia’s economy”, Bloomberg Business, janvier 2016.

L’équipe de rédaction, « Le choc pétrolier », Connaissance des Énergies, juillet 2011.

L’équipe économique, Prévisions mondiales actualisées, Banque Scotia, mars 2016.

Gordon Kristopher, U.S. Oil and Gas Companies’ Debt Exceeds $200 Billion, Market Realist, décembre 2015.

Heath Long, Oil Still Has a Chokehold on Stocks, CNN Money, février 2016.

International Energy Agency, https://www.iea.org - Lien externe au site. S’ouvre dans une nouvelle fenêtre., consulté en mars 2016.

L’Agence France-Presse, « La chute du baril de pétrole menace les banques canadiennes », Le Journal de Montréal, février 2016.

Matt Egan, Why the Stock Market Is Obsessed With Oil, CNN Money, janvier 2016.

Shawn McCarthy, “Record-high crude reserves set to surge in coming months”, The Globe and Mail, 14 février 2016.

Tancred Lidderdale et Trisha Hutchins, “U.S. Household gasoline expenditures expected to fall in 2015”, U.S. Energy Information Administration, avril 2015.

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