Atterrissage économique en cours : nous suivons notre plan

LE RAPPORTEUR - DEUXIÈME TRIMESTRE DE 2024

ATTERRISSAGE ÉCONOMIQUE EN COURS : NOUS SUIVONS NOTRE PLAN

Scott Adams, créateur de la célèbre bande dessinée Dilbert, a développé plusieurs concepts sur la réussite dans ses écrits et discours. L’une de ses idées les plus intrigantes est la « règle des 25 % », aussi connue sous le nom d’empilement de compétences. Selon Adams, au lieu de viser la perfection dans un seul domaine, il est plus efficace de devenir compétent dans plusieurs disciplines, en se situant parmi les 25 % des meilleurs dans chaque spécialité1.

Adams illustre ce principe avec son propre parcours, admettant qu’il n’a jamais été le meilleur en dessin, mais qu’il était meilleur que la plupart des gens (top 25 %). De même, il n’était pas le plus drôle, mais il surpassait la moyenne (top 25 %). La règle des 25 % repose donc sur l’idée que la combinaison de compétences diversifiées peut créer un avantage compétitif significatif. Adams n’est ni le meilleur dessinateur ni le meilleur humoriste. Cependant, sa maîtrise suffisante de ces deux domaines lui a permis de produire une synergie unique, donnant naissance à Dilbert, l’une des bandes dessinées les plus populaires et influentes au monde.

De manière similaire, en gestion de portefeuille, il est crucial de ne pas se fier à un seul indicateur, un seul expert ou une seule approche, même si ceux-ci ont affiché un taux de succès élevé par le passé. Il est essentiel de comprendre et d’intégrer plusieurs facteurs afin de prendre des décisions éclairées. C’est ici qu’intervient la notion de confluence des facteurs, qui fait référence à l’utilisation simultanée de différents signaux convergents pour augmenter la probabilité de prendre de bonnes décisions.

Dans le Rapporteur-Perspectives 2024, nous avons présenté nos quatre scénarios économiques qui ont servi de base pour notre positionnement de portefeuille. À la lumière des faits saillants du récent trimestre, plusieurs éléments convergent vers une même direction, nous amenant à croire que le fameux atterrissage économique tant discuté a peut-être commencé. L’objectif de cette lettre financière est donc d’examiner ces trois indicateurs et de vous rassurer sur la conformité de notre « plan de vol » actuel à cette possibilité, qu’il s’agisse d’un atterrissage en douceur ou brutal.

  1. Amplification de la disparité de performance
  2. Décélération de la croissance économique
  3. Élargissement des écarts de crédit aux États-Unis

 

SOMMAIRE DES RENDEMENTS — 2024

INDICES DE RÉFÉRENCE Rendement en $ CA
Or +12,79 %
S&P/TSX +6,06 %
MSCI Monde +16,01 %
NASDAQ Composite +22,77 %
Obligataire universel FTSE TMX Canada -0,38 %
Pétrole +13,80 %

No 1 : Amplification de la disparité de la performance

En consultant le tableau des rendements, l’écart de performance entre le S&P 500 et le S&P/TSX est particulièrement notable. En effet, cette différence s’explique principalement par l’excellent rendement des Sept Magnifiques2, qui ont contribué à elles seules à 83 % de la performance enregistrée par le S&P 500 au premier semestre. Fait intéressant, en excluant la performance de ces quelques titres, le S&P 500 afficherait plutôt un rendement d’environ 4 %. Il faut également souligner que leur contribution au rendement du S&P 500 a été près de trois fois plus importante au deuxième trimestre (136 %) qu’au premier trimestre (48 %)3. Cela démontre une amplification de la disparité de la performance observée au cours du dernier trimestre.

À cet égard, il est pertinent de prêter attention à la performance de la version équipondérée du S&P 500. Ce type d’indice offre une représentation équilibrée d’un marché, puisque toutes les actions membres ont la même pondération dans le calcul de la performance, contrairement au S&P 500, où le poids d’un titre est déterminé par la capitalisation boursière. Ainsi, pour le premier semestre, la version équipondérée du S&P 500 a généré un rendement de plus de 10 % inférieur à celui obtenu par le S&P 500.

En décortiquant la performance, on remarque qu’elle est beaucoup moins reluisante que ce qu’elle paraît, un constat qui s’applique également au S&P/TSX. Après une performance positive au premier trimestre (+6,62 %), le deuxième trimestre s’est avéré négatif (-0,52 %). D’ailleurs, seulement quatre secteurs (Consommation de base, Énergie, Matériaux et Services publics) ont connu une hausse, dont deux affichant un rendement inférieur à 1 % (Services publics : +0,21 %, Énergie : +0,88 %).

No 2 : Décélération de la croissance économique

Selon certains, cette disparité de la performance n’est qu’un rappel de ce qui s’est produit en 2023 et ne devrait donc pas être une source d’inquiétude pour la deuxième moitié de l’année. Nous sommes toutefois d’avis que, cette fois-ci, cela reflète le début de la décélération de la croissance économique.

Tout d’abord, au cours de chacun des trimestres de 2023, la croissance du produit intérieur brut (PIB) américain n’a jamais été inférieure à +2 % et la création d’emplois mensuelle moyenne a été de 251 000. Jusqu’à présent, la croissance du PIB au premier trimestre a été de 1,4 %, et, selon l’Atlanta Fed GDPNow, une croissance modeste de 1,5 % est prévue pour le deuxième trimestre, en date du 3 juillet. En ce qui concerne l’emploi, depuis le début de l’année, la création moyenne mensuelle d’emplois est de 222 000. Il convient de noter qu’au cours des trois derniers mois, cette moyenne est tombée à 177 000. De plus, le taux de chômage est désormais à 4,1 %, le niveau le plus élevé depuis novembre 2021, où il était de 4,2 %.

Au Canada, le ralentissement économique est plus marqué, ce qui explique la récente décision de la Banque du Canada d’abaisser le taux directeur en juin, avec une autre réduction probable en juillet. En plus d’une inflation annualisée qui demeure sous la barre des 3 %, la détérioration du marché de l’emploi semble rendre la récession inévitable. D’après l’économiste David Rosenberg, le taux de chômage, qui s’élève à 6,4 %, est à son plus haut en sept ans, exception faite de la période pandémique. Il dépasse de 150 points de base le point le plus bas du cycle, soit 4,9 % enregistré en juillet 2022. Depuis 1967, le Canada n’a jamais échappé à une récession officielle lorsque le taux de chômage a augmenté aussi rapidement en l’espace de deux ans4.

No 3 : Élargissement des écarts de crédit aux États-Unis

Bien que l’économie américaine ait démontré une résilience plus forte que celle du Canada, les écarts de crédit ont commencé à s’élargir, sans constituer pour le moment une situation dramatique. Néanmoins, cette évolution mérite une surveillance attentive, car elle confirme que le ralentissement économique est bel et bien amorcé.

L’écart de crédit, défini comme la différence entre le taux d’intérêt d’une obligation et celui d’une obligation de référence de même durée (généralement une obligation gouvernementale perçue comme la moins risquée), représente la prime de risque que les investisseurs exigent pour compenser la probabilité de défaut de l’émetteur. En période de ralentissement économique anticipé, les taux d’intérêt exigés pour les obligations risquées augmentent souvent par rapport à ceux des obligations gouvernementales. Ce phénomène est connu sous le nom d’élargissement des écarts de crédit.

Jusqu’à tout récemment, ces écarts étaient à leurs niveaux les plus bas depuis 2021, une période marquée par une relance économique soutenue post-pandémique. Aujourd’hui, ces écarts se sont considérablement élargis, indiquant une prudence accrue des participants du marché obligataire quant aux perspectives économiques chez nos voisins du Sud.

REVUE DE PERFORMANCE — PREMIER SEMESTRE DE 2024

TYPE DE PORTEFEUILLE GOB Indice de référence Valeur ajoutée
CROISSANCE +8,76 % +10,97 % -2,21 %
OBLIGATAIRE +4,15 % -0,37 % +4,52 %
ACTIONS PRIVILÉGIÉES +18,57 % +14,20 % +4,37 %
ÉQUILIBRÉ FISCAL +8,71 % +8,87 % -0,17 %

NOTRE GESTION DE PORTEFEUILLE

En début d’année, pour élaborer notre stratégie de portefeuille, nous avons présenté quatre scénarios économiques en tenant compte de deux enjeux clés : le risque d’inflation et la croissance économique. Au premier trimestre, le scénario de résilience économique prévalait, car les banques centrales n’étaient pas en mesure d’abaisser les taux directeurs en raison de la persistance de la croissance économique et d’une inflation maîtrisée, mais ne progressant pas rapidement vers la cible de 2 %.

En nous basant sur les trois signaux évoqués précédemment, nous avons évolué vers un autre quadrant, celui de l’atterrissage en douceur. Ce dernier combine le meilleur des deux mondes : la croissance économique ralentit graduellement pour prévenir une récession et l’inflation continue de décélérer, permettant ainsi aux banques centrales de réduire davantage les taux directeurs. Aux États-Unis, la Réserve fédérale américaine (Fed) devrait diminuer le taux directeur à deux reprises cette année, ce qui est encourageant puisque beaucoup craignaient récemment qu’il n’y ait aucune réduction en 2024. Paradoxalement, toute mauvaise nouvelle économique est perçue positivement par les marchés financiers. Non seulement les cours obligataires augmentent à cause de la baisse des taux d’intérêt, mais les actions grimpent aussi dans l’espoir que les banques centrales réussissent à contenir l’inflation sans nuire à l’économie.

De notre côté, tout est en place pour une éventuelle transition vers le scénario économique que nous jugeons le plus probable : une récession modérée. En consultant la section Annexe, vous remarquerez que nous avons effectué peu de transactions au cours des trois derniers mois. Que ce soit le signal d’alerte émis par notre modèle prévisionnel, le concept de délai de transmission5 ou la diminution prononcée de l’excédent d’épargne des ménages accumulé durant la pandémie, le maintien de notre niveau de liquidités est justifié pour composer avec un éventuel contexte économique plus incertain que celui de l’atterrissage en douceur anticipé actuellement par les participants de marché.

Cela explique pourquoi le marché boursier est actuellement calme. Cependant, il est possible que la volatilité s’intensifie dans les semaines à venir. En date du 8 juillet, cela faisait 345 jours que le S&P 500 n’avait pas affiché un rendement négatif de plus de 2 %6. En juin, l’indice de référence américain n’a jamais perdu plus de 0,50 % en une journée. Depuis 1980, la baisse annuelle moyenne du S&P 500, de son sommet à son creux, a été d’approximativement 14 %. Jusqu’à présent cette année, la plus importante baisse n’a été que d’environ 5 %7.

Pour conclure, nous ne pouvons passer sous silence la performance exceptionnelle des actions privilégiées, tant sur le plan de la performance relative que de la valeur ajoutée dans le volet obligataire. Comme expliqué dans le Rapporteur-1er trimestre 2024, 15 % du portefeuille obligataire était investi dans des actions privilégiées. Pour mieux comprendre les catalyseurs derrière la performance de cette classe d’actifs et ses perspectives futures, nous vous invitons à visionner notre capsule vidéo à ce sujet.

En somme, notre plan est solidement établi pour gérer l’atterrissage économique en cours. Quelles que soient les turbulences à venir, nous restons aux commandes, ceintures bien bouclées. Nous sommes prêts à naviguer dans toutes les conditions, confiants de notre stratégie et déterminés à atteindre nos objectifs.

ANNEXE

TITRE TYPE DE TRANSACTION PRIX DATE
Wells Fargo (WFC) Vente partielle 60,21 $ 7 mai
CVS Health (CVS) Ajout 56,00 $ 7 mai
Orange (ORAN) Vente totale-Dividende
étranger
11,50 $ 28 mai
Orange (ORAN) Rachat 10,56 $ 11 juin
Power Corp. (POW.TO) Vente partielle 39,17 $ 5 juin
Marché monétaire canadien – Compte surintérêt Altamira NBI Achat - 5 juin

Sources :

Carson Investment Research (2024). Long Time Since The Last Drop of 2 %, 8 juillet.

DataTrek Morning Briefing (2024).. Q2 and YTD Performance Review, 30 juin.

Federal Reserve Bank of Atlanta (2024). GDPNow, 8 juillet.

J.P. Morgan Asset Management. Guide to the Markets, 30 juin 2024.

Rosenberg Research (2024). Economic Commentary. Breakfast with Dave, 25 juin.

Thomas Waschenfelder (2020). Building Wealth With The 25 % Rule. Wealest, 20 février.

  1. Waschenfelder (2020)Return to footnote 1 referrer
  2. Alphabet, Amazon, Apple, Meta, Microsoft, Nvidia et TeslaReturn to footnote 3 referrer
  3. DataTrek Morning Briefing (2024)Return to footnote 5 referrer
  4. Roserberg Research (2024)Return to footnote 7 referrer
  5. Le temps nécessaire pour que les hausses de taux affectent négativement l’économieReturn to footnote 9 referrer
  6. Carson Investment Research (2024)Return to footnote 11 referrer
  7. J.P. Morgan Asset Management (2024)Return to footnote 13 referrer

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