Les années 2022 et 2023 ont été une période extrêmement difficile pour les investisseurs détenant des titres à revenu fixe. Afin de lutter contre une inflation élevée et persistante, les banques centrales ont adopté des régimes monétaires plus restrictifs. En conséquence, les taux d’intérêt ont bondi, ce qui a fait chuter les cours des obligations, cet effet inverse étant habituel.
Le bon côté de ce scénario : les investisseurs ont maintenant l’occasion d’acheter des obligations ou des certificats de placement garanti (CPG) à des taux présentant les rendements les plus attrayants des 16 dernières années. À la suite de la hausse des taux d’intérêt, les investisseurs se demandent s’ils devraient utiliser des CPG plutôt que des obligations comme source de revenu sûr. Mais est-ce la meilleure option?
Nous croyons intéressant de faire un petit retour sur les principales caractéristiques des obligations et leurs avantages par rapport aux produits plus traditionnels tels que les CPG. L’objectif est de soupeser les différents rôles que jouent les obligations et les CPG dans un portefeuille, ainsi que les avantages et les inconvénients potentiels à prendre en compte dans sa composition. Cependant, avant de passer à l’analyse de chacun des produits, vous devez savoir que les taux de rendement des obligations sont actuellement égaux ou supérieurs à ceux des CPG pour les termes 1 à 5 ans. Voir le tableau suivant :
Titres à revenu fixe | 1 an | 2 ans | 3 ans | 4 ans | 5 ans | 10 ans | 20 ans |
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CPG | 5,25 % | 5,25 % | 5,00 % | 5,00 % | 5,00 % | ||
Obligation provinciale | 5,00 % | 5,00 % | 4,60 % | 4,60 % | 4,45 % | 5,00 % | 5,00 % |
Obligation municipale | 5,50 % | 5,40 % | 5,25 % | 5,25 % | 5,25 % | 5,50 % | |
Obligation d’entreprise | 5,90 % | 6,00 % | 6,00 % | 6,40 % | 6,30 % |
* Taux en date du 25 octobre 2023
Qu’est-ce qu’une obligation? Une obligation est un placement dans lequel un investisseur prête de l’argent à une entité pendant une période définie, généralement à un taux d’intérêt fixe. L’émetteur peut être une administration fédérale, provinciale, d’État ou municipale, ou encore un organisme paragouvernemental, une société, un gouvernement étranger et même une institution privée. Les obligations sont considérées comme beaucoup moins risquées que les actions et procurent une source de revenu stable et prévisible sous forme d’intérêts. La valeur d’une obligation peut fluctuer en fonction de la variation des taux d’intérêt en vigueur, de la durée de son échéance et de la qualité du crédit.
Lorsque vous achetez une obligation, vous prêtez de l’argent à l’émetteur, généralement en échange de versements d’intérêts périodiques et du remboursement du capital à l’échéance. Il incombe à l’émetteur de payer les intérêts et de rembourser le capital au porteur de l’obligation, conformément aux modalités de la convention d’achat. Les obligations peuvent constituer une partie importante d’un portefeuille de placement diversifié, car elles présentent généralement une corrélation faible ou négative avec les actions et peuvent procurer un flux de revenu régulier, en plus d’un potentiel d’appréciation du capital. Cependant, il est important d’examiner attentivement la solvabilité de l’émetteur et les conditions de l’obligation avant d’effectuer un placement. La santé financière de l’émetteur détermine la notation (élevée ou non) de l’obligation.
Les obligations bien notées sont considérées comme plus sûres et, par conséquent, versent moins d’intérêts, tandis que les obligations moins bien notées paient des taux d’intérêt plus élevés pour rémunérer les investisseurs qui prennent plus de risques perçus. Comme indiqué précédemment, la notation d’un émetteur peut évoluer dans un sens ou dans l’autre au fil du temps. Dans l’échelle de risque, on peut nommer, du plus sécuritaire au plus risqué, les obligations : du gouvernement fédéral du Canada, des provinces canadiennes, des municipalités québécoises, des grandes banques canadiennes, des assureurs canadiens, des entreprises d’utilité publique, des entreprises du secteur de la consommation, de celles du secteur des ressources naturelles, etc.
Supposons qu’une société canadienne fictive ait émis 100 millions de dollars d’obligations, d’une valeur nominale de 100 $, et qu’elle verse un coupon fixe de 3 % pendant trois ans.
Si les taux en vigueur sont identiques au taux d’intérêt annuel de l’obligation (ou « coupon de 3 % »), le cours reste à 100 $. Cependant, si les taux augmentent et dépassent le taux du coupon de l’obligation, comme ce fut le cas en 2022, il devient moins intéressant d’investir dans une obligation qui n’offre que le versement d’un coupon de 3 % chaque année, de sorte que le cours de l’obligation se négocie en deçà de sa valeur nominale, c’est-à-dire en deçà de 100 $. À mesure que l’on se rapproche de l’échéance, le cours de l’obligation tend vers sa valeur nominale, jusqu’au moment où la société canadienne fictive en question doit rembourser les 100 millions de dollars à ses investisseurs, à raison de 100 $ par obligation. Cet effet est appelé « retour à la valeur nominale ».
Aujourd’hui, les obligations sont intéressantes, car bon nombre d’entre elles se négocient en deçà de leur valeur nominale; par conséquent, le rendement total d’un investisseur en obligations est composé à la fois du versement des coupons annuels et de l’appréciation du capital découlant de l’effet de retour à la valeur nominale. L’inverse se vérifie lorsque les taux en vigueur diminuent, comme ce fut le cas en 2019 et en 2020. Lorsque les taux en vigueur tombent en deçà du coupon annuel de l’obligation, il devient plus intéressant de détenir cette obligation qui rapporte 3 % par année, de sorte que le cours de l’obligation se négocie au-dessus de la valeur nominale, c’est-à-dire au-dessus de 100 $.
Environnement | Cours |
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Taux en vigueur > coupon de l’obligation | Inférieur à la valeur nominale/inférieur à 100 $ |
Taux en vigueur = coupon de l’obligation | Valeur nominale/100 $ |
Taux en vigueur < coupon de l’obligation | Supérieur à la valeur nominale/inférieur à 100 $ |
Les cours des obligations évoluent au fil du temps, mais finissent toujours par retourner à la valeur nominale. Les cours sont inversement corrélés avec les taux en vigueur : ils baissent lorsque les taux augmentent et augmentent lorsque les taux baissent.
Trois raisons pour lesquelles les obligations sont supérieures aux CPG dans la composition d’un portefeuille de placement :
Un des avantages d’acheter des obligations est la liquidité et la souplesse quotidiennes qu’elles confèrent à votre portefeuille. Les obligations peuvent être revendues à la valeur marchande n’importe quand entre la date d’achat et la fin du terme. Vous souvenez-vous de mars 2020, lorsque les actions américaines (mesurées par l’indice S&P 500) ont reculé de plus de 30 %? Si votre argent avait été placé dans un CPG non remboursable, vous n’auriez pas été en mesure de rééquilibrer votre portefeuille et de profiter de cette occasion d’acheter des actions. En revanche, les investisseurs détenant des obligations auraient été en mesure de rééquilibrer leur portefeuille en utilisant leur pondération en obligations comme source de financement. En cas de besoin, vos obligations sont toujours négociables.
Sur 40 ans, les obligations canadiennes ont enregistré un rendement supérieur à celui des CPG à un an 83 % du temps. Les obligations canadiennes ont affiché un rendement excédentaire moyen de 3,56 % par année.
Pourquoi les obligations ont-elles nettement surpassé les CPG pendant les années qui ont suivi les années de rendements obligataires négatifs?
Après chaque période de rendement obligataire négatif suit une période de rendement obligataire haussier. Ce fut le cas après la période des hausses de taux d’intérêt des années 80, de 1994 et de 2014, et les probabilités sont élevées pour qu’un tel revirement se produise au cours des deux prochaines années.
Chaque fois que les obligations subissent une mauvaise période de performance résultant d’une hausse des taux d’intérêt des banques centrales, les investisseurs se découragent, vendent leurs obligations à perte sans raison et achètent des CPG à taux plus élevé. Ils voient ensuite les prix des obligations exploser au cours des trois années suivantes alors qu’ils doivent conserver leurs CPG non liquides à rendement plus faible. Les investisseurs paient des coûts d’opportunité importants, surtout à long terme, lorsqu’ils sont incités à investir dans des CPG après des périodes de volatilité des marchés.
Les obligations ont tendance à rebondir fortement après de courtes périodes pendant lesquelles elles sont surclassées par les CPG.
La valeur des CPG ne baisse jamais, mais elle n’augmente jamais non plus
L’une des principales raisons pour lesquelles les obligations surpassent les CPG sur de plus longues périodes, comme sur trois ans et sur cinq ans, est que les obligations se « revalorisent automatiquement » en grande partie. À mesure que les rendements augmentent et que les prix baissent, le fait de bénéficier de la souplesse nécessaire pour obtenir des rendements courants plus élevés permet aux investisseurs de récupérer une partie du capital perdu. L’utilisation de CPG pour se soustraire au risque d’évaluation au prix du marché est attrayante, mais il faut garder à l’esprit qu’un investisseur renonce à la possibilité de profiter de rendements plus élevés lorsqu’il immobilise ses avoirs dans des CPG au taux affiché.
Les rendements après impôt des obligations sont meilleurs que ceux des CPG.
Dans un compte non enregistré, une obligation à escompte assortie d’un rendement à l’échéance semblable à celui d’un CPG peut avoir un rendement après impôt plus élevé, car seulement 50 % des gains en capital sont imposables.
Obligation A | CPG | Différence entre les obligations et les CPG | ||
---|---|---|---|---|
Caractéristiques | Durée | 1 an | - | |
Rendement à échéance | 5,06 % | 5,05 % | 0,01 % | |
Échéance | 100 $ | - | ||
Cours | 97,77 $ | 100 $ | - | |
Coupon | 2,83 % | 5,5 %- | - | |
Placement | 1 000 000 $ | - | ||
Rendement | Rendement du coupon | 28 300 $ | 50 500 $ | - |
Cours/rendement lié au renouvellement | 22 300 $ | - | - | |
Rendement total | 50 600 $ | 50 500 $ | - | |
Efficience fiscalenote de bas de page 1 | Impôt sur le revenu | 14 869 $ | 26 533 $ | - |
Impôt sur les gains en capitalnote de bas de page 2 | 5 858 $ | - | - | |
Impôt total payé | 20 727 $ | 26 533 $ | -5 806 $ | |
Taux d’imposition combiné | 41 % | 53 % | -12 % | |
Revenu net après impôt | 29 873 $ | 23 967 $ | 5 096 $ | |
Rendement après impôt | 2,99 %note de bas de page 3 | 2,40 % | 0,59 %note de bas de page 4 |
Sources : Obligations A, fabricant canadien d’aliments emballés de 14 G$ avec une cote de solvabilité de qualité supérieure et un rendement à l’échéance de 5,06 %, selon Bloomberg au 2 décembre 2022; échéance le 21 novembre 2023. Le taux de 5,05 % pour le CPG à un an non encaissable a été donné par BMO Ligne d’action le 5 décembre 2022. Versements annuels. Le taux d’imposition de 52,4 % correspond au taux d’imposition marginal supérieur moyen pondéré de la province en janvier 2023.
Trois scénarios possibles pour 2024-2025 et leurs répercussions sur les obligations
Pour conclure
La Réserve fédérale américaine (Fed) a relevé ses taux de 500 points de base depuis janvier 2022 : nous n’avions pas assisté à des hausses de taux de cette ampleur en plus de 30 ans. C’est une occasion à saisir, car il est peu probable que la Fed procède à d’autres hausses de taux aussi fortes, même s’il peut rester une ou deux hausses à venir. En effet, une récente étude de la Bank of America a révélé que les gestionnaires de fonds mondiaux n’avaient jamais autant surpondéré les obligations en 13 ans : ils profitent manifestement de cette occasion.
À l’approche de la fin du cycle de hausse des taux de la Fed, le coût d’opportunité potentiel lié au choix des CPG par rapport aux obligations à court terme augmente. Ce changement est alimenté par la prévision que les obligations se stabiliseront et reprendront leur rôle habituel, soit de diversifier le portefeuille, tout en offrant des rendements à long terme plus élevés que les CPG. Cette prévision découle de la relation inverse entre les rendements et les prix des obligations, qui a engendré la négociation à escompte de nombreuses obligations pendant le cycle de hausse des taux, permettant aux investisseurs obligataires de bénéficier à la fois des paiements de coupons et de l’appréciation du capital grâce à l’effet « pull-to-par ».
Les investisseurs font souvent preuve d’un biais cognitif connu sous le nom de biais de récence, qui consiste à baser les performances futures attendues sur les performances récentes, qu’elles soient positives ou négatives. Dans ce contexte, les investisseurs peuvent s’attendre à ce que les rendements négatifs des obligations persistent et que l’attrait relatif actuel des CPG demeure. Toutefois, il est important de noter que ces conditions économiques non conventionnelles caractérisées par une inflation élevée et des hausses rapides des taux d’intérêt ne devraient pas continuer dans les années à venir. À mesure que les banques centrales diminuent les pressions de resserrement quantitatif, nous sommes d’avis que les marchés pourraient voir les rendements des obligations dépasser encore une fois ceux des CPG.
Communiquez avec votre conseiller en placements dès aujourd’hui pour en savoir plus sur les stratégies d’obligations à utiliser dans la gestion de votre portefeuille. Ces stratégies vous procurent une liquidité quotidienne, un potentiel de hausse et une efficience fiscale que n’offrent pas les CPG.
Sources : Desjardins, Études économiques, Valeurs mobilières Desjardins, BCA Research, MRB Research, Fidelity Investments, Banque du Canada, Federal Reserve, RPIA Investment, Banque CIBC.
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