Les marchés financiers mondiaux ont livré des gains exceptionnels lors du mois de novembre. Les indices obligataires ont dégagé des rendements anormalement élevés alors que l’on constatait un changement de paradigme en faveur de baisses importantes de taux d’intérêt par les banques centrales de la planète en 2024.
La plongée des taux d’intérêt a aussi mis la table pour une hausse généralisée des marchés boursiers. L’indice MSCI ACWI (All Country World Index) s’est apprécié de 6,96 % en dollars canadiens au cours du mois de novembre, ce qui en fait sa meilleure performance depuis novembre 2020. Les actions mondiales ont regagné la majeure partie du terrain perdu depuis le sommet de juillet dernier.
Aux États-Unis, on a pu assister à la meilleure performance mensuelle cumulative des fonds négociés en bourse sur les actions du S&P 500, les obligations à long terme (TLT) et les obligations à haut rendement (HYG) depuis la crise financière de 2008. L’indice Bloomberg répliquant la composition d’un portefeuille équilibré 60/40 traditionnel a vu sa meilleure performance mensuelle à vie. L’avancée des actions en novembre s’est aussi étendue aux actifs à risque élevé tels que l’indice Goldman Sachs des entreprises technologiques non profitables (+20,32 %) et le Bitcoin qui a grimpé de 9 %.
L’optimisme généré par la possibilité de voir des baisses de taux d’intérêt plus tôt que prévu et d’échapper à une récession qui semblait auparavant inévitable a clairement agi comme catalyseur du dynamisme positif des marchés. Le sentiment des investisseurs a effectué un virage abrupt par rapport à ce qu’il était il y a quelques mois. Il est toutefois encore difficile de nier le risque d’une récession prochaine, et les espoirs des investisseurs quant à un atterrissage en douceur de l’économie pourraient être déçus.
Économie : Qu’est-ce qui est à l’origine d’un tel revirement de sentiment des investisseurs? Après avoir navigué en territoire négatif entre juin et début août, l’indice mondial Economic Surprise a rebondi, signalant une amélioration du dynamisme économique. Initialement, ce rebond était isolé aux États-Unis, mais la tendance s’est vite élargie à l’Europe et aux pays émergents. Pendant ce temps, les pressions inflationnistes se sont assouplies. L’indice mondial Inflation Surprise est revenu à sa moyenne d’avant l’éruption des pressions inflationnistes de 2021-2022. En ce sens, même si elle est toujours présente, il semble que l’inflation ne soit plus la menace dominante pour l’économie mondiale.
Cela signifie que le cycle actuel de contraction des conditions financières pourrait avoir atteint son zénith. Plusieurs signes pointent en ce sens.
Aux États-Unis, l’assouplissement du marché de l’emploi, le recul de l’inflation et la révision à la hausse du PIB font en sorte que le scénario d’atterrissage en douceur fait maintenant partie du consensus des analystes financiers. Les économistes et analystes n’anticipent aucune contraction trimestrielle de l’économie en 2024. Depuis le retour des marchés en hausse, il est aussi difficile de trouver un économiste pessimiste à propos de l’économie américaine que de récolter des fraises au Québec en plein mois de janvier.
Cependant, après le plus sévère cycle de resserrement monétaire des 40 dernières années, le risque de récession demeure présent. Selon BCA Research, les données statistiques pointent vers une récession en seconde moitié de 2024, soit 2,5 années après la première hausse de taux (mars 2022), un peu plus d’un an après que le taux directeur a surpassé le taux neutre estimé (décembre 2022) et 9 mois après ce qui était probablement la dernière hausse de taux de la Fed. La question demeure : l’économie pourra-t-elle rester résiliente? Même si la phase de hausses des taux est probablement terminée, leur plein impact ne s’est pas encore entièrement fait sentir dans l’économie. Cela implique que l’augmentation des surprises économiques négatives pourrait éventuellement nourrir à nouveau un récit selon lequel l’économie se dirige vers une récession.
Au Canada, la création d’emploi commence à s’affaiblir et est toujours en retard sur le rythme de la croissance démographique. Le nombre de postes vacants est en baisse. Le taux de chômage continue de grimper sous l’influence d’une diminution des embauches et non d’une augmentation des mises à pied, et le nombre d’heures travaillées tend à diminuer. Du côté de l’inflation, on continue à voir un progrès constant. L’ensemble du portrait actuel nous permet de croire que la demande excédentaire se résorbe lentement. Cela devrait aider à ramener graduellement l’inflation sous-jacente vers la cible de la Banque du Canada (BdC), soit 2 %. Selon le gouverneur de la BdC, Tiff Macklem, les taux sont assez restrictifs pour y arriver.
Le mercredi 6 décembre, la Banque du Canada a annoncé dans un communiqué qu’elle maintenait son taux cible du financement à un jour à 5 % : « Étant donné que plus de signes indiquent que la politique monétaire restreint les dépenses et allège les pressions sur les prix, le Conseil de direction a décidé de maintenir le taux directeur à 5 % et de continuer à normaliser le bilan de la Banque. Il demeure préoccupé par les risques entourant les perspectives d’inflation et reste prêt à augmenter de nouveau le taux directeur si nécessaire. Le Conseil de direction veut voir l’inflation fondamentale continuer de baisser, et ce, de façon durable. Il surveille encore de près l’équilibre entre l’offre et la demande, les attentes d’inflation, la croissance des salaires et les pratiques d’établissement des prix des entreprises. La Banque reste déterminée à rétablir la stabilité des prix pour la population canadienne . »
Bref, la Banque du Canada voit que les hausses de taux produisent leur effet sur l’économie et les prix. Toutefois, elle « demeure préoccupé[e] » par les perspectives d’inflation, notamment par les salaires et les frais de loyer. Ce communiqué de presse donne raison aux économistes de Desjardins qui prévoient que l’économie canadienne connaîtra des difficultés au cours des prochains trimestres, ce qui devrait possiblement se traduire par une première baisse de taux d’ici le milieu de 2024.
MARCHÉ OBLIGATAIRE : un mois « spectaculaire »
Les marchés obligataires mondiaux ont été secoués par une poussée de la volatilité des taux d’intérêt, alimentée par la modération de l’inflation et d’autres indicateurs précurseurs. Il faut dire que le changement de ton des banquiers centraux a aussi eu un effet non négligeable.
L’optimisme des investisseurs à l’égard du marché obligataire est devenu évident. Selon les récentes données de sondage de la Bank of America auprès de multiples gestionnaires de fonds, la conviction que les taux obligataires vont baisser en 2024 n’a jamais été aussi forte, ce qui les a encouragés à surpondérer leur allocation nette d’actifs en revenu fixe à un niveau inégalé depuis mars 2009. L’indice obligataire canadien du FTSE a grimpé de 4,29 % en novembre, offrant une performance officiellement positive de 3,15 % pour l’année.
D’un autre côté, les rendements sont de retour et offrent d’excellentes occasions. Le niveau élevé des taux actuels présente simultanément deux avantages : augmenter l’espérance de rendement pour nos produits en revenu fixe (et l’ensemble de nos portefeuilles) et redonner aux obligations leur capacité de protection en cas de revers économique et boursier. Si l’on se fie aux statistiques passées, comme démontré dans le graphique de gauche ci-dessous, la baisse des taux obligataires a tendance à se poursuivre après la dernière hausse de taux par la banque centrale. L’année 2024 pourrait être celle des obligations. Néanmoins, à court terme, un risque subsiste quant à une légère remontée des taux à la suite d’un tel revirement baissier.
MARCHÉS BOURSIERS : réaction positive aux anticipations de baisse de taux
La reprise des actions mondiales observée en novembre s’est appuyée d’abord et avant tout sur les anticipations de baisses prochaines des taux d’intérêt. L’indice américain S&P 500 a connu une hausse de 9,13 % (en dollars US). Chiffré en dollars canadiens, le gain mensuel est ramené à 6,82 % en raison de la dévalorisation du dollar US (-2,32 % par rapport au dollar canadien en novembre). Du côté de l’indice technologique américain, le Nasdaq a bondi de 10,84 %. Au Canada, le TSX a suivi la cadence et a grimpé de 7,49 %, effaçant complètement les pertes des derniers mois. Ailleurs dans le monde, les indices MSCI EAFE et MSCI marchés émergents ont avancé de 6,99 % et 5,73 % respectivement (en dollars canadiens).
L’importance de rester investi et bien diversifié en fonction de votre profil
Après les mauvaises performances des mois d’août, septembre et octobre, le rendement de l’ensemble des profils de portefeuille a rebondi spectaculairement et varie maintenant entre 5 % et 10 % depuis le début d’année. C’est attrayant comparativement à un CPG 1 an qui offrait 4,25 % en janvier dernier; d’où l’importance d’être continuellement investi et bien diversifié.
Attention aux excès de confiance
Après l’impressionnante performance du mois dernier, les investisseurs pourraient être amenés se demander si le rythme de l’actuelle reprise, fondée sur l’espoir d’un revirement dans la politique monétaire, peut être soutenable. D’ailleurs, d’un point de vue technique, les indices sont étirés. La croyance que la BdC et la Réserve fédérale réduiront leurs taux aussi rapidement que le marché l’espère a suscité des avertissements pessimistes de plusieurs stratèges de Wall Street. On assistera peut-être à un changement de la politique monétaire par les banques centrales, mais sera-t-il à la hauteur des attentes du marché? Pour conclure, plusieurs éléments pourraient atténuer l’enthousiasme des investisseurs à court terme :
Est-ce que cela indique qu’un repli majeur des marchés est anticipé? Pas nécessairement. Cependant, l’histoire est remplie de moments où les investisseurs ont spéculé et vendu la peau de l’ours avant de l’avoir tué. Pour cette raison, il est préférable de limiter la chasse aux rendements et de s’assurer d’avoir une gestion de portefeuille bien balancée.
Répartition tactique des portefeuilles en gestion discrétionnaire gérés par l’Équipe Moreau Bergeron Paré
Nous tenons à vous préciser que le positionnement tactique actuel de nos portefeuilles se situe tout près des cibles établies dans notre politique de placement. Nous sommes légèrement sous-pondérés en actions et avons profité des hausses de taux d’intérêt survenues en 2022 et 2023 pour augmenter notre pourcentage en obligations. Nous détenons un certain niveau de liquidité nous permettant de réagir aux fluctuations de marché et attendons patiemment l’arrivée d’un ralentissement économique.
SURVOL DES TRANSACTIONS EFFECTUÉES AU COURS DU MOIS DE NOVEMBRE
En novembre, nous avons ajouté les obligations suivantes dans les portefeuilles : Province d’Alberta 2033, Gouvernement du Canada PSP Capital 2033, Banque TD 2029. Nous avons diminué la position dans le fonds mutuel Mackenzie Core Bonds et utilisé les liquidités pour financer les nouveaux achats. Sources : Études économiques Desjardins, Valeurs mobilières Desjardins, BCA Research, MRB Research.
Nous vous remercions de votre confiance et vous souhaitons un joyeux temps des fêtes avec votre famille.
Chacun des conseillers de Valeurs mobilières Desjardins (VMD) dont le nom est publié en page frontispice du présent document ou au début de toute rubrique de ce même document atteste par la présente que les recommandations et les opinions exprimées aux présentes reflètent avec exactitude les points de vue personnels des conseillers à l’égard de la société et des titres faisant l’objet du présent document ainsi que de toute autre société ou tout autre titre mentionné au sein du présent document dont le conseiller suit l’évolution. Il est possible que VMD ait déjà publié des opinions différentes ou même contraires à ce qui est ici exprimé. Ces opinions sont le reflet des différents points de vue, hypothèses et méthodes d’analyse des conseillers qui les ont rédigées. Avant de prendre une décision de placement fondée sur les recommandations fournies au présent document, il est conseillé au receveur du document d’évaluer dans quelle mesure celles-ci lui conviennent, au regard de sa situation financière personnelle ainsi que de ses objectifs et besoins de placement.