Alors que l’inflation canadienne est de retour dans la fourchette ciblée par la Banque du Canada (BdC), la victoire semble moins assurée chez nos voisins du Sud. Les prochaines séquences de données seront donc décisives! Si l’inflation revient à la cible, la Réserve fédérale américaine (Fed) pourra commencer à relâcher la pression, mais si elle demeure à un niveau inconfortable, la Fed sera forcée de maintenir la pression plus longtemps, et même de l’augmenter, ce qui pourrait engendrer des conséquences économiques plus importantes.
CANADA - Comme on s’y attendait, la BdC a maintenu le taux des fonds à un jour à 5 % lors de sa dernière réunion, le 10 avril. Ce dernier n’a pas bougé depuis juillet 2023. Fait important : elle a laissé entendre que sa prochaine annonce concernerait une réduction et que celle-ci aurait lieu dans un avenir rapproché. L’inflation est moins élevée, mais en plus, les prévisions quant à la croissance du produit intérieur brut (PIB) réel ont été revues à la baisse.
Même si la BdC a maintenu les taux inchangés comme prévu, son ouverture à une baisse laisse planer peu de doute sur ce qui s’en vient. Il reste à savoir à quel moment cela se produira. Les économistes de Desjardins sont toujours d’avis que, lors de la prochaine réunion en juin, on commencera à préparer le terrain pour des baisses de taux qui prendront probablement effet en septembre. Ce qui empêche la BdC d’agir en ce moment est l’écart qui se creuserait entre les taux canadiens et américains si elle intervenait trop rapidement. Une différence trop grande ferait chuter le dollar canadien et augmenterait indirectement l’inflation au Canada en raison des coûts d’importation des marchandises et aliments en provenance des États-Unis.
ÉTATS-UNIS - L’économie a surpris et est passée à la vitesse inférieure au premier trimestre. La progression du PIB global de 1,6 % a été sensiblement en deçà des attentes de 2,5 %. Si les dépenses des ménages ont ralenti, elles sont restées relativement fortes.
L’activité industrielle américaine a connu une expansion inattendue en mars. Ce fut un mois robuste en création d’emplois, la demande de main-d’œuvre dépassant toujours l’offre. L’inflation a excédé les prévisions pour le troisième mois consécutif, tandis que la mesure préférée de la Fed a confirmé la tendance, dévoilant que les progrès en matière de maîtrise de l’inflation semblent s’essouffler. Enfin, les prix des matières premières sont en hausse depuis le début de l’année, ce qui accroît le biais inflationniste.
Dans l’ensemble, qu’est-ce que cela signifie pour la Fed? La décélération de l’activité économique et l’augmentation de la pression sur les prix qui se produisent simultanément lui compliquent la tâche. On peut s’attendre à ce que les banquiers centraux américains restent sur la touche jusqu’à la fin de l’année, ce qui laisserait plus de temps aux taux d’intérêt élevés pour faire leur travail.
INTERNATIONAL — La croissance mondiale semble rebondir. Plusieurs indicateurs d’activité se redressent et le Fonds monétaire international (FMI) a récemment revu à la hausse ses perspectives de croissance. La dynamique d’exportation des petites économies ouvertes (comme celles de Taïwan et de Corée) et la performance économique suédoise concordent avec une reprise du commerce international. L’activité manufacturière de la Chine est en expansion, tandis que la zone euro est sortie de la récession au premier trimestre de 2024 avec une croissance beaucoup plus rapide que prévu.
DEVISES — Le dollar canadien affiche une dépréciation d’un peu plus de 1 % sur le mois d’avril. En comparaison, la surperformance économique des États-Unis a contribué à renforcer l’indice du dollar américain. Comme mentionné plus tôt, le dollar canadien pourrait être soumis à davantage de pressions et la barre de 1,40 $ CA/$ US pourrait vraisemblablement être mise à l’épreuve dans les prochains mois.
MARCHÉS FINANCIERS — Les marchés financiers sont passés du mode défensif au mode offensif au milieu d’avril, et l’environnement était toujours haussier au moment d’écrire ces lignes le 15 mai. Disons que l’on valse au gré des statistiques sur l’inflation. En avril, le marché a subi une correction et reculé de 6 % par rapport à son sommet en raison des données démontrant une inflation plus difficile à ramener en zone de stabilité. La totalité de ce mini-recul a ensuite été récupérée à la mi-mai, après le dévoilement d’une statistique plus encourageante du côté américain.
Selon les données du 15 mai, l’inflation américaine s’est établie à 3,6 %, soit son plus bas niveau depuis deux ans. Lors de leur dernière rencontre, les responsables de la Fed ont indiqué dans leurs déclarations politiques qu’ils resteraient patients et attentifs aux données, et qu’il serait probablement question d’une réduction plutôt que d’une augmentation lors de la prochaine annonce. En ce qui concerne le prix des obligations, le marché parie que les statistiques d’avril concernant l’inflation pourraient être suffisantes pour que la Fed abaisse ses taux d’intérêt cette année. On a donc interprété ces informations en faveur d’un atterrissage en douceur, soit un ralentissement graduel de l’économie américaine suivi d’une légère réduction des taux d’intérêt, ce qui favoriserait autant les détenteurs d’actions que les détenteurs d’obligations.
Au moment d’écrire ces lignes, plus de 55 % des capitalisations boursières du S&P 500 avaient publié leurs résultats. Les bénéfices ont dépassé les attentes de 8,4 %, ce qui est nettement supérieur à la moyenne historique de 4,8 % et aux 6,9 % du dernier trimestre. Les prévisions de croissance du bénéfice par action (BPA) étaient de 4 % au début de la saison des résultats; elles sont désormais de 8,3 %. La bonne performance des entreprises en matière de profits a été un autre facteur déterminant dans le revirement de tendance au sein des marchés depuis le creux du milieu d’avril.
Malgré ce bel élan d’optimisme, gardons la tête froide, car les valorisations du S&P 500 sont revenues à un ratio cours/bénéfices de 21 au 15 mai. Selon l’indice interne de Desjardins Gestion internationale d’actifs (DGIA) basé sur l’historique depuis 1995, le S&P 500 est dans le 92e centile. La dernière fois que le taux des bons du Trésor à 10 ans avait atteint son niveau actuel, en 2007, le ratio cours/bénéfices à terme des actions américaines se situait dans la fourchette de 14-15. En résumé, le marché américain n’est pas à prix d’aubaine. Il faudra surveiller de près les occasions de transaction à meilleur prix du côté canadien ou international.
MARCHÉ OBLIGATAIRE — Le marché obligataire a également eu un comportement erratique du début avril au 15 mai. Il est passé de 4,35 % à un sommet de 4,70 % pour ensuite revenir s’établir à 4,36 %. Par effet gravitationnel, les taux canadiens ont suivi ceux des États-Unis, malgré une économie davantage fragilisée et des progrès plus notables dans le combat contre les pressions inflationnistes.
PRODUITS DE BASE — Les matières premières ont continué à faire les gros titres, les rendements du pétrole, du cuivre et de l’or surclassant ceux des indices boursiers mondiaux en 2024. De nombreux facteurs sont en cause : l’augmentation des risques géopolitiques en raison de la crainte d’un conflit de plus grande ampleur au Moyen-Orient, les frappes de drones ukrainiens sur les raffineries russes qui soulèvent la possibilité de perturbations de l’approvisionnement, les réductions volontaires de la production par l’OPEP+, les troubles politiques limitant l’offre de cuivre et la demande accrue d’or de la part des banques centrales.
Selon Apollo, les prix des produits de base pourraient rester orientés à la hausse en raison de la forte croissance américaine, de l’incertitude géopolitique, de la segmentation du commerce mondial, de la demande d’énergie en Asie du Sud-Est et de l’intelligence artificielle (IA).
L’économie chinoise ayant connu une meilleure performance que ce qui était prévu (notamment dans le secteur manufacturier) et l’offre mondiale plutôt restreinte ont offert davantage de soutien au prix du cuivre, lequel a atteint son plus haut niveau depuis avril 2022 (10 135 $/tonne). Le prix du pétrole brut a progressé de 14 % depuis le début de l’année. À 82 $ le baril, le pétrole a subi une légère pression baissière, reculant de 1,5 % en avril, et ce, alors que l’augmentation de la production pétrolière américaine compense en partie les réductions de production de l’OPEP+. L’once d’or a encore une fois atteint un nouveau record historique à 2 391 $ avant de se stabiliser à 2 286 $. Ce métal précieux a vu son cours grimper de 2,5 % en avril et ainsi réalisé une performance totale de +10,8 % en 2024. Ce léger recul par rapport au sommet atteint est intervenu en raison des perspectives de cessez-le-feu au Moyen-Orient et du risque que l’inflation élevée pèse sur la demande américaine. Menées par la Chine, les banques centrales mondiales continuent d’ajouter des lingots à leurs stocks, ce qui soutient le dynamisme de l’or.
Notons qu’en 2024, les actions aurifères ont sous-performé vis-à-vis le sous-jacent. Le fonds VanEck Gold Miners, regroupant des producteurs d’or de toutes tailles à l’échelle mondiale, accuse un retard de 37 % par rapport au métal jaune.
Malgré la récente flambée des prix, les matières premières restent dans un creux par rapport au S&P 500. Avant aujourd’hui, un tel écart n’avait été observé qu’en 1973 et en 2000.
IMPORTANCE DE LA STRATÉGIE D’INVESTISSEMENT À LONG TERME — L’histoire nous le rappelle une fois de plus : malgré les fluctuations de marché, il est important de prendre du recul, et il est généralement préférable pour les investisseurs à long terme de conserver leurs placements plutôt que d’abandonner. L’environnement financier est toujours parsemé d’embûches, et les investisseurs doivent rester pragmatiques et rationnels. On ne doit pas céder à l’inquiétude ou, pire, tomber dans la panique. L’essentiel est de croire en la répartition stratégique d’actifs, à laquelle nous avons consacré beaucoup de réflexion et d’efforts. La personne qui investit doit s’en tenir à son profil de risque et à son plan d’action.
Répartition tactique des actifs des portefeuilles en gestion discrétionnaire pris en charge par l’Équipe Moreau Bergeron Paré
Nous tenons à vous préciser que la position tactique actuelle de nos portefeuilles se situe tout près des cibles de répartition (en matière de titres à revenu fixe et d’actions) qui sont établies dans notre politique de placement.
Au cours du dernier mois, nous avons fait l’acquisition du titre Ag Growth International (AFN : TSX). Reconnue à l’échelle internationale en tant qu’entreprise experte dans son domaine, AGI fournit aux agriculteurs, aux transformateurs et aux clients commerciaux le matériel approprié et les solutions d’ingénierie personnalisées dont ils ont besoin pour produire, protéger et livrer les céréales, les engrais, les semences, les aliments pour animaux et les denrées du monde entier. AGI propose l’un des catalogues d’équipements et de services de planification et d’ingénierie les plus vastes et les plus complets pour le stockage, le mélange, le transport, le conditionnement et la transformation des produits agricoles.
Nous avons également remodelé nos positions internationales qui étaient détenues par l’entremise des fonds Manuvie et Renaissance. Les deux fonds ont été vendus et remplacés par le Fonds d’actions internationales de qualité GQG Partners et le Fonds Desjardins Actions outre-mer. Nous avons tiré avantage de la bonne performance du marché américain pour réaliser des profits et allouer un pourcentage des investissements à l’international. Les valorisations sont moins élevées de l’autre côté de l’Atlantique et nous pensons que les portefeuilles peuvent en tirer profit.
Notez que nous préférons nous concentrer sur les titres nord-américains et déléguer la gestion des actions internationales à des équipes spécialisées qui comptent des analystes présents directement sur les autres continents.
Chacun des conseillers de Valeurs mobilières Desjardins (VMD) dont le nom est publié en page frontispice du présent document ou au début de toute rubrique de ce même document atteste par la présente que les recommandations et les opinions exprimées aux présentes reflètent avec exactitude les points de vue personnels des conseillers à l’égard de la société et des titres faisant l’objet du présent document ainsi que de toute autre société ou tout autre titre mentionné au sein du présent document dont le conseiller suit l’évolution. Il est possible que VMD ait déjà publié des opinions différentes ou même contraires à ce qui est ici exprimé. Ces opinions sont le reflet des différents points de vue, hypothèses et méthodes d’analyse des conseillers qui les ont rédigées. Avant de prendre une décision de placement fondée sur les recommandations fournies au présent document, il est conseillé au receveur du document d’évaluer dans quelle mesure celles-ci lui conviennent, au regard de sa situation financière personnelle ainsi que de ses objectifs et besoins de placement.