Que se passe-t-il avec les banques?
Plusieurs annonces inattendues dans les secteurs bancaires américain et européen ont surpris les marchés financiers ces dernières semaines. Que s’est-il passé avec la Silicon Valley Bank (SVB), la Signature Bank, Silvergate Capital et Credit Suisse? Ces événements ont-ils eu une incidence sur les institutions financières? Ont-ils suscité des inquiétudes quant à l’éventualité d’une crise bancaire pouvant s’étendre à l’ensemble du système financier mondial? Voici un sommaire démystifiant la situation de la SVB. Michel Doucet, vice-président, stratège en investissement et gestionnaire de portefeuille chez Valeurs mobilières Desjardins (VMD) a répondu à quelques-unes de nos questions.
La SVB occupait le 16e rang des banques commerciales les plus importantes aux États-Unis. Fondée en 1983, elle fournissait des services bancaires à des entreprises technologiques et en démarrage. La SVB a grandement bénéficié de la croissance du secteur des technologies ces dernières années, grâce à la demande accrue de services numériques due à la pandémie. La SVB s’est effondrée soudainement le vendredi 10 mars dernier à la suite d’un retrait massif des dépôts de ses clients. L’effet de surprise a été l’élément déclencheur.
La SVB avait investi l’excédent de ses dépôts dans des obligations du gouvernement américain pendant la période des bas taux d’intérêt. Étant donné l’inflation, les coûts d’emprunt élevés et l’accès restreint aux nouveaux capitaux, les entreprises en démarrage faisant affaire avec la SVB ont été contraintes de puiser dans leurs dépôts détenus par la banque pour financer leurs activités. La SVB est donc devenue rapidement sous-capitalisée. La surprise a été causée lorsque la SVB a annoncé qu’elle avait vendu des obligations du gouvernement américain à perte pour faire face à la demande accrue de liquidités de ses clients et qu’elle était forcée de se refinancer. À la suite de ces mauvaises nouvelles, les clients ont retiré massivement leurs dépôts, occasionnant une chute rapide de la valeur des actions de la banque et, conséquemment, sa fermeture.
Pour éviter une crise bancaire plus large et préserver la confiance dans le système bancaire, les autorités américaines sont intervenues rapidement. La SVB a été fermée et placée sous tutelle par la Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC). La Silicon Valley Bridge Bank a donc été créée pour succéder à la SVB et ainsi poursuivre les opérations bancaires. La FDIC a annoncé la garantie de l’intégralité des dépôts des clients de la SVB.
Les inquiétudes touchent actuellement les banques régionales américaines de taille moyenne mal diversifiées et trop concentrées dans un secteur précis de l’économie
Il est important de noter que les difficultés reliées aux banques américaines touchent uniquement les banques régionales de moyenne taille. Les grandes banques telles J.P. Morgan, Bank of America, Wells Fargo et Citigroup ne se trouvent pas dans cette situation. De plus, les problèmes relatifs à la confiance dans les banques régionales de plus petite taille devraient grandement favoriser les mégabanques.
Plusieurs informations recueillies au cours des dernières semaines nous portent à croire que les déboires de la SVB, de Silvergate Capital, et de la Signature Bank exposent le mauvais travail de leurs équipes de direction. En d’autres mots, les récentes difficultés économiques provoquées par la hausse des taux d’intérêt ont dévoilé au grand jour l’incompétence de la direction de ces banques régionales en matière de contrôle et de gestion des risques.
Cependant, la proactivité des surveillants du secteur bancaire est un élément important qui nous distingue de la crise financière de 2008 et elle indique clairement que les dirigeants ne laisseront pas l’histoire se répéter.
Le secteur bancaire canadien est-il dans la même situation que les banques américaines et européennes?
De l’avis de nos stratèges chez VMD et des économistes de Desjardins, la réponse est NON. Les institutions financières canadiennes sont surcapitalisées et elles doivent respecter des normes plus rigoureuses. Elles ont généralement une approche plus diversifiée et prudente en matière de financement, de prêts et d’investissements. Elles mènent leurs activités dans un environnement réglementaire plus strict et différent que celui des banques américaines, ce qui les rend généralement plus solides et résistantes aux crises financières. La SVB a souffert d’une approche moins diversifiée et d’une forte exposition au secteur technologique.
Que devons-nous retenir en tant qu’investisseurs?
N’oublions pas que les crises sont passagères et qu’elles sont aussi porteuses d’occasions. Alors que la SVB fermait ses portes, les grandes banques américaines comme J.P. Morgan et Bank of America observaient un immense afflux de nouveaux clients et de dépôts, comme quoi le malheur des uns peut faire le bonheur des autres. Les récentes turbulences nous rappellent les risques et les vulnérabilités de certaines banques, mais surtout la solidité des autres.
D’ailleurs, au moment d’écrire ces lignes, nous apprenons que la First Citizens BancShares Inc s’engage à acheter les actifs de la SVB. La banque a conclu une entente d’achat et de reprise de tous les dépôts et prêts de SVB. La transaction comprend l’achat d’actifs d’environ 72 milliards de dollars américains pour 16,5 milliards de dollars américains. La First Citizens Bank a une certaine expérience en matière de rachat de rivaux en déconfiture. Elle a en effet acquis plus de 20 banques soutenues par la FDIC depuis 2009.
Il est donc essentiel pour les investisseurs d’avoir un plan financier solide, bien défini et surtout bien diversifié. Un tel plan est essentiel pour se protéger des imprévus et surtout de profiter des occasions de placement dans un marché semblable à celui que nous observons actuellement. Dans le secteur des placements, les leçons apprises des crises passées ont encore démontré que les émotions n’ont pas leur place dans un processus analytique raisonné.
Qu’en est-il des portefeuilles en gestion discrétionnaires administrés par l’Équipe Moreau Bergeron Paré?
Nous tenons à vous préciser que les portefeuilles gérés par l’équipe de vos conseillers VMD ne détiennent pas de titres de banque régionale ou de fonds de banques régionales américaines ou européennes. Aux États-Unis, nous détenons uniquement des actions de J.P. Morgan et de Bank of America. Au Canada, nous détenons des actions de la Banque Royale, de la Banque TD et de la Banque de Nouvelle-Écosse.
Gérer ses émotions à la lumière des faits
Même si vos émotions vous font ressentir certaines choses à propos d’événements importants qui se produisent, d’un point de vue historique, le portrait peut être différent. Dans le graphique ci-dessous, le passé rappelle nombre d’événements ayant suscité bien de l’anxiété. À long terme, toutefois, les marchés se sont redressés et ont généralement récompensé ceux qui ont investi tôt et qui ont respecté leur stratégie de placement, peu importe les événements externes. Le passé n’est pas garant du rendement futur, mais une compréhension historique des marchés peut vous aider à faire fi de vos émotions.
Rappel : Historiquement, les marchés progressent au rythme de la croissance économique et se redressent généralement après des périodes de forte volatilité. Concentrez-vous sur votre plan et sur les raisons pour lesquelles que vous investi.
Sources : Desjardins, Études économiques, Valeurs mobilières Desjardins, Visual Capitalist, Mackenzie Financial, Investissement TD, J.P. Morgan, Bloomberg, Banque Nationale.
Survol des transactions effectuées au cours du mois de mars 2023
Étant donné que le pétrole a reculé fortement à la suite des craintes d’un ralentissement économique provoqué par une possible crise financière, les producteurs de pétrole canadiens ont atteint des niveaux d’évaluation très intéressants. Nous avons donc pris la décision de faire l’acquisition des titres du producteur canadien Suncor au cours du mois de mars. Suncor génère actuellement un dividende de plus de 5 %. L’entreprise a diminué de 17 % uniquement dans la foulée des craintes alimentées par la crise du secteur bancaire et représente à notre avis une excellente occasion d’achat à long terme. Elle a profité de la reprise du secteur pétrolier à la suite à la COVID-19 pour assainir son bilan. La direction fait preuve de discipline dans le choix de ses dépenses en capital et elle continuera de retourner ses fonds nets autogénérés sous la forme de rachats d’action ou d’augmentation du dividende.
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