Le mois d’août a constitué une véritable bouffée d’air frais pour le marché immobilier canadien après une période difficile. Le prix moyen des propriétés existantes a affiché sa première hausse mensuelle depuis février, et le rythme de la baisse des ventes a fortement ralenti. De plus, les mises en chantier sont restées élevées. Cette situation suit une détérioration du prix des propriétés existantes après leur sommet national, atteint en février. Les ventes ont dégringolé encore davantage, ramenant rapidement les marchés de l’habitation locaux à l’équilibre. Bon nombre d’entre eux ont été des marchés d’acheteurs pendant la pandémie, voire avant.
Alors, qu’est-ce qui attend le marché immobilier canadien? La réponse sera en grande partie fournie par la Banque du Canada (BdC) qui ne semble pas vouloir arrêter les hausses de taux de sitôt. Après une augmentation massive de 100 points de base en juillet et une autre de 75 points en septembre, le discours subséquent de la première sous-gouverneure Carolyn Rogers a clairement indiqué que la demande continue de dépasser l’offre dans de nombreux secteurs de l’économie canadienne et que les prévisions d’inflation à court terme demeuraient élevées. Elle a aussi ajouté que les pressions à la hausse sur les prix perdureraient tant que ce serait le cas. Et, on peut s’attendre à ce que la politique monétaire demeure ferme tant que ces pressions seront présentes. Nous anticipons une autre augmentation de 50 points de base en octobre, et peutêtre davantage d’ici la fin de l’année.
Par conséquent, nous ne nous voyons pas le bref sursis de la correction du marché de l’habitation du mois dernier se maintenir. Bien que la réduction du prix des propriétés existantes ne suive pas une trajectoire linéaire, le risque demeure fortement orienté vers le bas, car les coûts d’emprunt continuent d’augmenter. Ceci n’est vraiment qu’un début, car ce sont surtout les Canadiens et les Canadiennes avec des prêts hypothécaires à taux variable qui font actuellement les frais de cette hausse des taux d’intérêt. En effet, bon nombre de détenteurs de prêts hypothécaires à taux fixe n’ont même pas encore commencé à sentir la pression monter. Les mises en chantier devraient également suivre la tendance à la baisse des ventes et des prix des propriétés existantes, alors que la contraction de la demande touche la construction d’habitations neuves avec un certain retard.
La hausse des taux d’intérêt devrait continuer de ralentir l’investissement résidentiel au Canada au cours des prochaines années. En fait, le recul a commencé au deuxième trimestre de cette année, avec une baisse trimestrielle annualisée de près de 28 %. Mais ce n’est pas le seul secteur de l’économie canadienne qui subit les contrecoups de la hausse des coûts d’emprunt. La consommation réelle de biens durables a chuté à un rythme annualisé de 12 % au deuxième trimestre, soit la pire baisse trimestrielle depuis le creux causé par les mesures de confinement du deuxième trimestre de 2020. D’autres secteurs de l’économie canadienne s’en tirent mieux jusqu’à présent, mais le resserrement de la politique monétaire nuira également à leur croissance. Par conséquent, nous prévoyons que l’activité économique ralentira considérablement au Canada, ce qui mènera à une légère récession au premier semestre de 2023 (voir notre récent Point de vue économique sur le sujet.)
Mais tout n’est pas perdu! Le ralentissement de la demande intérieure réduira graduellement les pressions inflationnistes, ce qui incitera par la suite la BdC à diminuer les taux d’intérêt. Nous sommes d’avis que ces baisses devraient commencer vers la fin de l’année prochaine. Cela devrait contribuer à améliorer l’abordabilité du logement, qui a continué de s’éroder en raison de la hausse des coûts d’emprunt, et ce, malgré la chute des prix des propriétés. Cependant, avant d’en arriver là, nous avons une tempête à traverser. Comme dit le proverbe, « après la pluie, le beau temps »!
Par Randall Bartlett, directeur principal, économie canadienne
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