Lettre financière, automne 2020, 53e édition

La reprise aura pris 100 jours, mais restons prudents.

Sept mois se sont écoulés depuis que la COVID-19 a été déclarée pandémie. Le coronavirus a provoqué un choc économique inégalé depuis la Grande Dépression et il continue, à ce jour, à bouleverser nos habitudes. Dans plusieurs pays, la contraction a été historique et l’impact de la pandémie demeure inégal, selon les secteurs d’activité et les types d’emplois.

Après cet effondrement, la production s’est rapidement redressée avec la levée des mesures de confinement et le redémarrage des activités économiques.

Cette amélioration de la toile de fond économique s’est aussi fait sentir sur le marché du travail. Aux États-Unis, 51,5 % des travailleurs mis au chômage de mars à avril (22 millions au total) avaient retrouvé un emploi à la fin septembre; respectivement, 76,1 % au Canada et 86,2 % au Québec.

Indices Niveau 3 mois 6 mois 1 an
S&P/TSX 16 121,38 4,78 % 22,50 % -0,03 %
S&P 500 ( $US) 3 363,00 8,93 % 31,31 % 15,14 %
MSCI Pays émergents ( $US) 1 082,00 9,65 % 29,58 % 10,84 %
MSCI Monde ( $US) 2 367,27 8,05 % 29,19 % 11,01 %
Taux de change  $CAN/ $US 0,75 0,74 0,71 -0,61 %
Rend. oblig. Canada 2 ans 0,25 % 0,29 % 0,43 % -84,37 %
Rend. oblig. Canada 10 ans 0,56 % 0,53 % 0,70 % -58,78 %
Pétrole ( $US) 40,22 $ 39,27 $ 20,48 $ -25,61 %
Or ( $US) 1 885,82 $ 1 780,96 $ 1 577,18 $ 28,07 %

L’appui des gouvernements et de banques centrales continuera tant qu’il le faudra pour préserver la confiance, limiter l’incertitude et protéger les acquis des ménages et des entreprises, quitte à relancer l’économie après la deuxième vague de la pandémie.

Cet électrochoc budgétaire et monétaire a fait rebondir les bourses de leurs creux de mars. Tel un phare à l’horizon, les investisseurs ont vu que le degré soutien budgétaire et de détente monétaire allait propulser l’activité économique lorsque les mesures de santé publique allaient être assouplies. De son creux, les bourses ont rebondi tout l’été à l’exception du mois de septembre où l’élan a été freiné. Plusieurs craignent que la reprise économique manque de carburant alors que la deuxième vague de la COVID s’annonçait, que les négociations d’un nouveau plan d’aide budgétaire tiraient en longueur à Washington et que les élections américaines planaient sur l’horizon. En d’autres termes, la force du rebond a eu tendance à exposer les bourses à des prises de profit et au rééquilibrage des portefeuilles.
Nous auriez-vous crus si nous vous avions dit que le bilan financier des Canadiens (incluant le revenu disponible, le taux d’épargne et l’endettement) allait s’améliorer alors que l’économie subissait un choc d’une rare ampleur? C’est pourtant bien ce qui s’est passé.

L’augmentation du taux d’épargne résulte de l’impact du confinement sur les dépenses de consommation. Avant la pandémie, les Canadiens épargnaient en moyenne 3 % de leur revenu disponible annuellement. Pendant la pandémie, le taux d’épargne a grimpé jusqu’à 28 % (33,7 % aux États-Unis).

Longtemps considéré comme un risque important pour l’économie canadienne, l’endettement des ménages en pourcentage du revenu disponible a fondu de 175 % à 158 % du premier au deuxième trimestre.

Actions

À en croire les bourses, l’économie ne s’est jamais si bien portée! Pourtant, la réalité est toute autre. Voici quelques facteurs qui expliquent cette déconnexion :

  1. La bourse ne représente que les sociétés ouvertes, qui y sont inscrites, et exclut les autres, à capital fermé (PME, restaurant, construction, etc.), ainsi que l’apport gouvernemental.
  2. La répartition sectorielle d’un indice tel que le S&P 500 diffère du poids économique des secteurs d’activité.
  3. La bourse anticipe le marché de 6 à 9 mois avant l’économie, car elle projette les flux de trésorerie (cash flow) à venir des entreprises.
  4. Les performances boursières peuvent traduire les émotions fortes des investisseurs plutôt que les caractéristiques fondamentales.

Le contexte actuel est inusité, il défie l’entendement. Dans les manuels d’histoire, il sera décrit comme le fait marquant d’une génération. Ils retiendront les acronymes TINA (There Is No Alternative), FOMO (Fear Of Missing Out) se rappelant qu’après un effondrement de 35 % de son sommet de février à son creux de mars, l’indice MSCI ACWI (Indice mondial des bourses) a bondi de 57 % pour atteindre un nouveau sommet au début de septembre. En date du 30 septembre, l’indice affichait un recul d’à peine 2,5 %.

Sur un horizon de 12 à 18 mois, la toile de fond demeure plus favorable aux actions qu’aux autres catégories d’actifs. Cette prévision s’appuie sur le soutien inconditionnel des autorités publiques pour relancer une croissance durable de la production et de l’inflation, suivi de la découverte d’un vaccin ou d’un traitement contre la COVID.

Canada | sous-pondérer

La prudence reste de mise pour le TSX. Les défis des secteurs de l’énergie puis de l’immobilier après la COVID et la vulnérabilité de la demande intérieure liée à l’endettement des ménages expliquent l’essentiel de cette position. La récupération depuis mars est appréciable, mais laisse tout de même le TSX à un peu plus de 3 % de son niveau du début de l’année.

La composition du marché intérieur canadien limite la possibilité de comparer sa valorisation avec celle du voisin du sud. En effet, il contient très peu d’entreprises technologiques à forte croissance que les investisseurs gratifient de multiples plus élevés.

Au printemps, il était pertinent de s’inquiéter du secteur financier compte tenu des millions de ménages qui avaient opté pour le report des remboursements de crédits hypothécaires ainsi que de l’orientation incertaine des cours immobiliers. Dans les deux cas, la situation se révèle aujourd’hui bien meilleure que prévu. Primo, les récents résultats des banques ainsi que des commentaires lors de conférences du secteur font ressortir que la quasi-totalité des ménages emprunteurs a repris leurs paiements sans trop de difficulté quand les reports des remboursements ont pris fin. Qui plus est, alors que certains, dont la SCHL, appréhendaient une diminution des valeurs des biens immobiliers résidentiels, la situation est toute autre. Ainsi, advenant le cas où un emprunteur ne pourrait pas reprendre ses versements mensuels, l’institution ne subirait pas forcément une perte puisque la propriété hypothéquée pourrait vraisemblablement être revendue sans perte. Ainsi, les provisions déjà constituées par les banques canadiennes pourraient bien être suffisantes pour couvrir les pertes réelles, voire les dépasser.

États-Unis | surpondérer

En 2020, les États-Unis continuent de se distinguer, même si certains segments technologiques affichent une surévaluation évidente. Comptant pour plus de 60 % de la capitalisation mondiale dans les secteurs de la technologie, des communications et des services de la santé, le marché américain n’est pas près de voir son étoile cesser de briller.

Alors que les investisseurs laissent leur argent bien placé dans des titres qui sont les gagnants évidents de l’ère work from home (commerce en ligne, télémédecine, télétravail, etc.), le moment viendra un jour de songer au back to work. Cette grande rotation nécessitera des résultats concluants des vaccins potentiels et des traitements.

Europe | sous-pondérer

Les investisseurs attendent patiemment que l’Europe prenne et reprenne son envol depuis des années. Chaque fois qu’elle accélère sur la piste de décollage, elle est freinée dans son élan par un nid-de-poule creusé par l’appréciation de l’euro. Les gouvernements et la Banque centrale européenne ont beau pousser la manette des gaz à fond, la croissance économique n’arrive pas à décoller durablement. Nous continuons de recommander de sous-pondérer l’Europe dans un portefeuille adéquatement diversifié.

Marchés émergents | surpondérer

Les pays émergents pourraient nous surprendre. Les multiples d’évaluation y sont relativement abordables et les investisseurs boudent encore cette partie du monde. Aussi, l’histoire des pays émergents est pour l’essentiel celle de la Chine, de Taïwan et de la Corée du Sud. Trois bourses où le secteur des technologies est surreprésenté et plus abordable qu’aux États-Unis. En Chine, la force de l’épargne des ménages, le contrôle des capitaux, les taux d’intérêt bas et l’affaissement des salaires sont porteurs pour le marché boursier. Taïwan et la Corée du Sud sont une vitrine du secteur des technologies. La faiblesse du dollar américain est positive pour la croissance et les projets d’infrastructures des pays émergents, car ceux-ci empruntent majoritairement en dollar américain.

Les marchés boursiers affichent un second trimestre consécutif de gains extraordinaires que peu avaient prévus en mars. Les sceptiques ont encore été confondus. L’année 2020 passera à l’histoire comme une autre fantastique leçon sur la nécessité d’avoir un plan, de le suivre et de profiter des fluctuations excessives pour rééquilibrer. Le rééquilibrage dégage de la valeur et est le reflet de la discipline d’investissement.

Compte tenu des bas taux en début d’année, les attentes à l’égard des obligations étaient modestes. Pourtant, ce marché impressionne, encore! Par ailleurs, il a particulièrement progressé quand les actions ont chuté. Des investisseurs recherchent des obligations uniquement pour leur rendement à terme. Or, leur plus grande valeur pourrait très bien ne pas se trouver dans leur rendement à l’échéance, mais plutôt dans leur capacité de préservation de valeur face aux perturbations sporadiques offrant ainsi des munitions à vendre à bon prix pour saisir des opportunités d’actions escomptées.

À moins d’un changement important dans la situation personnelle de l’investisseur, il est préférable de garder le cap de sa stratégie d’investissement et de profiter pleinement des avantages du rééquilibrage du portefeuille. Un portefeuille adéquatement diversifié est conçu pour atteindre les objectifs à long terme.

Nous espérons que ces informations vous aideront à mieux comprendre les marchés et nous demeurons à votre entière disposition pour discuter plus longuement de nos stratégies d’investissement. Nous vous réitérons notre engagement à travailler toujours plus fort pour dénicher les bonnes occasions qu’offrent les marchés financiers, de manière à vous aider à réaliser vos objectifs à long terme.

Chacun des conseillers de Valeurs mobilières Desjardins (VMD) dont le nom est publié en page frontispice du présent document ou au début de toute rubrique de ce même document atteste par la présente que les recommandations et les opinions exprimées aux présentes reflètent avec exactitude les points de vue personnels des conseillers à l’égard de la société et des titres faisant l’objet du présent document ainsi que de toute autre société ou tout autre titre mentionné au sein du présent document dont le conseiller suit l’évolution. Il est possible que VMD ait déjà publié des opinions différentes ou même contraires à ce qui est ici exprimé. Ces opinions sont le reflet des différents points de vue, hypothèses et méthodes d’analyse des conseillers qui les ont rédigées. Avant de prendre une décision de placement fondée sur les recommandations fournies au présent document, il est conseillé au receveur du document d’évaluer dans quelle mesure celles-ci lui conviennent, au regard de sa situation financière personnelle ainsi que de ses objectifs et besoins de placement.

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