Les prévisions d'inflation ont été relevées à plusieurs reprises au cours des derniers trimestres et il y a encore des risques qu'elles soient revues à la hausse au cours des prochains mois. Les plus récentes révisions s'expliquent en partie par de nouveaux chocs d'offre, notamment en raison de la guerre en Ukraine. Les prix du pétrole et du gaz naturel ont augmenté depuis l'invasion russe, de même que les prix de certains métaux et produits agricoles. Cette guerre amène aussi de nouveaux problèmes dans les chaînes d'approvisionnement mondiales, incluant le secteur automobile. Plusieurs pays affichent maintenant une inflation supérieure à 6 %. En zone euro, où les effets de la guerre sont plus visibles, la récente poussée des prix a nettement dépassé les attentes.
À cela s'ajoute la pandémie, qui n'évolue pas aussi favorablement que souhaité. La remontée des cas dans plusieurs pays laisse croire que des confinements ou des taux d'absentéisme élevés pourraient encore perturber la production et les chaînes d'approvisionnement mondiales. Le maintien d'une politique zéro COVID en Chine, où des confinements stricts sont encore régulièrement appliqués, est particulièrement préoccupant. D'ailleurs, de récents indicateurs en Chine témoignent déjà d'une nouvelle détérioration dans les délais de livraison. L'évolution de la demande s'avère aussi plus forte que prévu, notamment au Canada où la vague Omicron n'a eu qu'un effet limité sur le PIB réel malgré le resserrement des mesures sanitaires. Le marché du travail canadien affiche d'ailleurs une vigueur remarquable, ce qui devrait continuer de soutenir la consommation. En mars, l'emploi était environ 2 % plus haut qu'avant la pandémie et avait rejoint sa tendance historique. Le taux de chômage à 5,3 % au Canada est le plus faible jamais enregistré depuis que la donnée est publiée. Les taux de chômage ont aussi considérablement diminué dans plusieurs autres pays au cours des derniers trimestres, revenant pour la plupart à des niveaux similaires à ceux d'avant la pandémie; voir plus bas. En zone euro, le taux de chômage à 6,8 % est le plus faible jamais enregistré depuis la création de la devise commune, en 1998.
L'excédent d'épargne accumulé pendant la pandémie pourrait être une source de stimulation de la demande. Maintenant que les mesures sanitaires sont retirées et que les consommateurs retrouvent graduellement leur vie normale, la tentation d'utiliser l'épargne accumulée pour consommer davantage pourrait être grande. Cela amène un risque bien réel de surchauffe économique et de pressions accrues sur les prix. Qui plus est, l'excédent d'épargnes détenues par plusieurs consommateurs pourrait les aider à accepter plus facilement les hausses de prix auxquelles ils font face. L'inflation élevée pourrait donc persister plus longtemps que prévu.
Le portrait plus sombre de l'inflation et l'empressement affiché par les banques centrales ont incités Desjardins à revoir à la hausse ses prévisions de taux d'intérêt à quelques reprises au cours des derniers mois. Les économistes de Desjardins prévoient maintenant que la BdC relèvera de 75 points le taux des fonds à un jour au début du mois de juin. Par la suite, deux autres augmentations de 25 points porteront le taux des fonds à un jour à 2,25 % d'ici la fin de l'été. Le principal taux directeur canadien devrait alors dépasser de 50 points le maximum atteint lors du précédent resserrement monétaire. Aux États-Unis, la fourchette supérieure du taux des fonds fédéraux devrait s'établir à 2,75 % à la fin de 2022, avec probablement deux autres hausses au début de 2023 qui le porteraient à 3,25 %. Le relèvement des taux serait également jumelé à une réduction de la taille du bilan de la Fed. Le resserrement plus agressif prévu aux États-Unis cadre avec son taux d'inflation plus élevé, son marché du travail plus tendu, ainsi qu'avec les risques plus importants de décrochage des anticipations d'inflation et de spirale inflationniste.
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