Malgré des tensions géopolitiques et une certaine incertitude quant aux perspectives économiques, l’enthousiasme à l’égard des marchés boursiers refuse de broncher ! Les nouveaux sommets se suivent et se succèdent à un rythme inattendu depuis le début de 2024, forçant plusieurs stratèges de Wall Street à revoir à la hausse leurs objectifs de fin d’année. Chaque fois qu’il y a un nouveau record, la concentration des rendements est accentuée. Si l’engouement des investisseurs pour l’intelligence artificielle (IA) est spectaculaire, on note aussi des signes de complaisance dans le marché. Compte tenu des gains de valorisation astronomiques, toute déception à l’égard des résultats pourrait être sévèrement sanctionnée par les investisseurs. Les attentes sont grandes… et difficiles à satisfaire !
L’an dernier, une récession imminente faisait consensus. Pourtant, il n’y en a toujours pas eu et, pour plusieurs, cela ne semble même plus faire partie des scénarios envisagés. En réalité, les récessions ne deviennent généralement évidentes que bien longtemps après avoir débuté.
À la suite d’une remontée vigoureuse des taux d’intérêt, tant par son ampleur que par sa rapidité, les consommateurs commencent à avoir un peu de répit, puisque certaines banques centrales ont récemment annoncé une première réduction de leurs taux. Le Canada et la zone euro, dont les économies figurent parmi celles qui sont avancées, ont commencé à assouplir leur politique monétaire. Au Canada, le taux cible des fonds à un jour est ainsi passé de 5,00 % à 4,75 % le 5 juin dernier. Au moment d’écrire cette lettre, nous anticipons une autre baisse lors de la rencontre de juillet. Malgré cette première réduction, la politique monétaire canadienne demeure très restrictive. Des baisses graduelles supplémentaires seront nécessaires pour ramener les taux directeurs dans une zone plus neutre, située aux alentours de 2,75 %. Si l’inflation continue de progresser dans la bonne voie au Canada, nous prévoyons trois autres baisses de taux directeur d’ici la fin de l’année, suivies de nouvelles diminutions en 2025 et 2026. Nous sommes d’avis que le taux cible des fonds à un jour de la Banque du Canada (BdC) pourrait descendre jusqu’à environ 2,25 % au début de 2026.
Du côté des États-Unis, la Réserve fédérale (Fed) devra se montrer plus patiente avant de commencer à réduire ses taux directeurs. Non seulement la demande fait preuve d’une plus grande résilience, mais certaines pressions haussières sur l’inflation subsistent. En outre, la progression des dépenses de consommation par personne est nettement plus robuste aux États-Unis que dans la plupart des autres pays industrialisés. Cela s’explique sans doute en grande partie par le fait que les termes hypothécaires sont plus longs aux États-Unis, comparativement à d’autres pays comme le Canada ou le Royaume-Uni, ce qui limite l’effet immédiat des hausses de taux d’intérêt. De plus, les investissements continuent de progresser, en particulier dans le secteur manufacturier. Certaines entreprises américaines ont commencé un rapatriement de leur production afin de limiter leur vulnérabilité aux aléas du commerce mondial, notamment dans le domaine de la fabrication de puces électroniques. Dans ces conditions, nous prévoyons que la Fed devra attendre jusqu’en novembre prochain, soit après la campagne électorale, avant de suivre la parade mondiale avec une première réduction de ses taux directeurs.
Indices |
Niveau |
3 mois |
6 mois |
1 an |
|
S&P/TSX |
21 875,79 |
-0,52 % |
6,06 % |
312,14 % |
|
S&P 500 ($ US) |
5 460,48 |
34,28 % |
15,29 % |
24,54 % |
|
MSCI Pays émergents ($ US) |
1 086,25 |
5,03 % |
7,60 % |
12,86 % |
|
MSCI Monde ($ US) |
3 511,78 |
2,77 % |
12,04 % |
20,78 % |
|
Taux de change $ CAN/$ US |
0,73 $ |
0,74 $ |
0,76 $ |
-3,20 % |
|
FTSE/TMX INDICE COURT TERME |
781,85 |
1,24 % |
1,57 % |
5,61 % |
|
FTSE/TMX INDICE MOY. TERME |
1 226,95 |
0,83 % |
-0,30 % |
3,89 % |
|
Pétrole ($ US) |
81,54 $ |
83,17 $ |
71,65 $ |
15,43 % |
|
Or ($ US) |
2 326,75 $ |
2 229,87 $ |
2 062,98 $ |
21,23 % |
La faiblesse absolue et relative des taux d’intérêt pendant les quinze dernières années nous a amenés à généralement surpondérer les actions en portefeuille, et principalement les actions américaines. Or, la lutte à l’inflation amorcée en 2022 et la richesse des évaluations courantes ont renversé la vapeur. En termes simples, il y a de nouveau une solution de rechange aux actions : les obligations !
Investir dans un contexte de décélération économique rime avec une certaine dose de précaution : on maintient une position relativement prudente à court terme afin d’être en mesure de saisir les occasions lorsqu’elles se présenteront. Nous recommandons une légère sous-pondération en actions, au profit d’une surpondération des obligations.
Au début 2022, nos attentes de rendement à long terme quant au portefeuille équilibré 50/50 étaient diminuées par des taux d’intérêt très bas, par la capacité de protection minime du marché obligataire ainsi que par une évaluation des actions supérieure aux moyennes historiques. Depuis, la lutte à l’inflation et la remontée des taux a permis de rétablir le rendement courant du marché obligataire et, peut-être plus important encore, de restaurer la capacité de protection des obligations.
Grâce à cette restauration du portefeuille 50/50, l’investissement peut être abordé avec une bonne dose de sérénité. Si l’économie fléchissait plus qu’escompté ou si les bourses devaient subir des soubresauts plus importants, l’exposition obligataire devrait au moins pouvoir compenser en partie ces pressions. Par surcroît, les attentes en matière de gains et de pertes pour les grandes classes d’actifs n’invitent pas à prendre beaucoup de risques.
Si les taux d’intérêt ne bougent pas beaucoup, au moins, le rendement courant a été rétabli à un niveau historiquement élevé et relativement attrayant par rapport aux actions. Par ailleurs, si les taux devaient baisser, le potentiel de gain pourrait être de 10 à 15 % selon les échéances obligataires.
Du côté des actions, si l’élan économique devait se maintenir et le ratio cours-bénéfice demeurer constant, elles pourraient générer un gain de 5 à 8 %, tout au plus. À l’inverse, si des difficultés économiques ou autres devaient venir perturber les marchés, les revenus pourraient reculer en même temps que se comprime le ratio cours-bénéfice, et nous pourrions assister à un fort repli des bourses.
Bref, est-ce que le jeu en vaut la chandelle ?
Après avoir connu trois années difficiles, le marché obligataire redevient attrayant, à la fois d’un point de vue absolu et relativement aux autres classes d’actifs. Compte tenu de l’inflation qui devrait maintenir sa tendance baissière et des économies qui ralentissent (ou basculent en récession, pour certaines), l’ajout d’obligations est de mise. Notre recommandation demeure la même : surpondérer les obligations gouvernementales, lesquelles constituent le refuge de prédilection en cas de récession.
En juin, l’évaluation de l’indice MSCI Monde a augmenté de 2 centiles pour atteindre le 92e centile. Cette légère augmentation s’explique par une hausse de l’indice S&P 500, qui est passé du 93e au 95e centile en un mois. En d’autres mots, la valeur de la bourse américaine (S&P 500) a été plus élevée seulement 5 % du temps par rapport à sa valeur actuelle.
Une cadence économique américaine en décélération, une économie canadienne qui continue d’opérer sous son potentiel, l’amorce d’un cycle de diminution des taux d’intérêt et des perspectives inflationnistes inégales selon les zones économiques invitent à beaucoup de nuances dans les choix sectoriels.
Nous recommandons de concentrer les efforts dans les secteurs et les actions dont la croissance des bénéfices est nettement supérieure à celle du marché et qui performent bien dans un contexte de faible croissance économique, de taux d’intérêt élevés et d’inflation persistante. Nous favorisons particulièrement les secteurs industriels, ainsi que la consommation de base et la santé. Comme on s’attend à ce que des baisses de taux se concrétisent au second semestre de 2024, les titres des services publics et des communications seront à privilégier.
Contrairement aux économies canadienne et européenne, l’économie américaine a résisté au resserrement monétaire jusqu’ici. Mais la demande n’est pas immunisée contre les hausses de taux d’intérêt aux États-Unis. Celles-ci finiront par freiner l’activité. En fait, le consensus des prévisionnistes n’a pas abandonné le scénario de ralentissement américain ; il l’a plutôt reporté à 2025. Or, ces perspectives sont assez cohérentes avec un délai plus long, mais pas anormal, entre le début des augmentations de taux d’intérêt et leur plein effet sur l’activité économique.
Même avec les meilleurs modèles, faire des prévisions économiques est périlleux. Le scénario escompté dans le marché boursier actuellement ne laisse que très peu de place à des déceptions. Au 92e centile de sa distribution historique, l’évaluation du MSCI Monde ne reflète rien de moins que des perspectives grandioses. La cherté n’est plus limitée à quelques titres américains de sociétés à très grande capitalisation et au bilan financier solide. Au fil des mois, elle s’est étendue à d’autres régions et segments de marché qui prévoyaient, il y a quelques trimestres, un ralentissement important.
En somme, l’adoption d’une position plutôt prudente semble de mise, bien que les bourses puissent encore être portées vers de nouveaux sommets.
Nous espérons que ces informations vous permettront de mieux comprendre les marchés et nous demeurons à votre entière disposition pour discuter plus longuement de nos stratégies d’investissement. Nous vous réitérons notre engagement à travailler toujours plus fort pour dénicher les bonnes occasions qu’offrent les marchés financiers, de manière à vous aider à réaliser vos objectifs à long terme.
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