Selon nous, à moins d’un dérapage structurel dans les discussions sino-américaines ou d’une baisse marquée de la confiance, une récession en Amérique du Nord est improbable d’ici 12 à 18 mois. Soulignons qu’il n’y a jamais eu de récession lorsque la politique monétaire et les conditions monétaires étaient à ce point souples. La portée de la demande intérieure sur l’économie américaine l’immunise partiellement contre le contexte économique étranger. Cette fois sera-t-elle différente? Permettez-moi d’en douter…
Pourquoi? Pour plusieurs raisons, dont la souplesse des conditions monétaires, la proactivité de la Fed, le plein emploi, la croissance des salaires, l’épargne disponible et la productivité des entreprises. Peu exposée au secteur extérieur, l’économie américaine continuera d’être appuyée par sa demande nationale, qui constitue 68 % du PIB.
Même si une récession est improbable en Amérique du Nord, elle s’est enracinée en Italie et elle pourrait aussi s’installer en Allemagne (effet d’une dégradation plus marquée du commerce international), au Royaume-Uni (effet du Brexit) et au Japon (effet de la hausse de la taxe à la consommation).
Indice | Niveau | 3 mois | 6 mois | 1 an |
S&P/TSX | 16 658.63 | 2,48% | 5,13% | 7,03% |
S&P 500 ($ US) | 2 976.74 | 1,70% | 6,08% | 4,25% |
MSCI Pays émergents ($ US) | 1001.00 | -4,16% | - 3,46% | -1,69% |
MSCI Monde ($ US) | 2 180.02 | 0.66% | 4.87% | 2.44% |
Taux de change $ CAN/$ US | 0,76 | 0,76 | 0,75 | -2,49% |
Rend. oblig. Canada 2 ans | 1,58% | 1,47 % | 1,55% | -28,64% |
Rend. oblig. Canada 10 ans | 1,36% | 1,47 % | 1,62% | -43,92% |
Pétrole ($ US) | 54,07$ | 58,47$ | 60,14$ | -26,18% |
Or ($ US) | 1 472,38$ | 1 409,45$ | 1 292,30$ | 23,47% |
Et la politique? Non conforme, imprévisible et impulsif, le président Trump est un important vecteur de risque pour l’économie mondiale et le commerce international. Depuis son élection en 2016, il a envoyé environ 14 000 tweets (soit une dizaine en moyenne par jour) à ses quelque 64 millions d’abonnés.
Historiquement, les investisseurs ont eu tendance à exclure la politique du cadre analytique. À l’ère Trump, elle est une variable incontournable. Selon Bank America Merrill Lynch et J.P. Morgan, les journées où le rythme d’activité dépasse la moyenne journalière de 10 tweets sont négatives pour les marchés boursiers. Notons que depuis l’élection de Trump, le Dow Jones s’est quand même apprécié de 42 %. Le graphique suivant illustre l’incidence de Trump, de ses tweets et du commerce (TTT en anglais, pour Trump, Tweet et Trade) sur l’indice MSCI Monde tous pays.
La baisse des taux d’intérêt demeure la grande surprise de 2019. Le mouvement baissier des taux d’intérêt auquel nous avons assisté depuis l’automne 2018 a été accentué par les différences économiques, monétaires et financières entre les pays, mais aussi par la politique internationale des États-Unis. En gardant bien enfoncé l’accélérateur monétaire, la Banque du Japon et la Banque centrale européenne ont poussé leur taux d’intérêt en territoire négatif, déclenchant un mouvement planétaire. Il y aurait environ 17 milliards de dollars d’obligations à taux négatifs mondialement (soit l’équivalent de 25 % du marché obligataire mondial). En Allemagne, les obligations fédérales à 10 ans ont atteint un plancher record de -0,71 % en août. Entraînées par les flux de capitaux internationaux, les obligations nord-américaines ont aussi affiché des taux d’une faiblesse sans précédent. Les obligations fédérales américaines à 30 ans ont franchi le seuil des 2 % en août. Au Canada, la résilience de l’économie, la diminution des taux hypothécaires et l’endettement élevé des ménages sont autant de facteurs qui soutiennent le statu quo de la Banque du Canada, mais cette dernière surveillera de près les développements entourant les tensions commerciales. Les nombreuses incertitudes devraient maintenir un environnement de taux très bas.
La stratégie liée aux titres à revenu fixe dépendra de l’évolution du cycle économique et financier, mais aussi de la politique américaine. Les élections américaines et le contexte de destitution brouillent les perspectives à plus long terme. Lorsque les indicateurs avancés cligneront aux rouges, signalant la fin du cycle, nous agirons pour profiter pleinement de la baisse des taux. Une surpondération des obligations à moyen et à long terme, une durée plus longue que celle de l’indice ainsi qu’une sous-pondération des titres de sociétés pourraient alors être appropriées. D’ici là, notre stratégie est de sous-pondérer les obligations et d’établir une durée plus courte que celle de l’indice au sein du portefeuille.
N.B. Nous avons récemment changé notre indice de référence pour le volet à revenu fixe. L’indice précédent, l’indice obligataire universel FTSE Canada, a une durée moyenne de 8,25 ans, ce qui est beaucoup trop long pour nos investisseurs. Dans cet indice, on retrouve 30 % d’obligations à 30 ans. Ce genre de durée ne fera jamais partie de nos portefeuilles compte tenu de l’âge moyen des clients et de la faiblesse des taux actuels. Notre nouvel indice de référence mixte est le suivant :
50 %, l’indice obligataire à court terme FTSE Canada, durée de 2,7 ans; et 50 %, l’indice des obligations à moyen terme FTSE Canada, durée de 6,3 ans
La moyenne de ces deux indices donne une durée moyenne de 4,5 ans, ce qui est beaucoup plus réaliste et moins restrictif.
Globalement, notre arbre décisionnel d’investissement sera influencé par les grands enjeux politiques, le commerce international, l’action publique (dont la gouvernance monétaire, budgétaire et fiscale), les données économiques (dont les PMI, les indicateurs avancés, la courbe de rendement, les bénéfices des entreprises, les coûts unitaires de main-d’œuvre et l’inflation), les marchés financiers et l’état d’esprit général des investisseurs. La gestion active prend tout son sens dans l’optimisation du rendement total d’un portefeuille.
Actuellement, la toile de fond économique et financière est favorable aux actions, une sous-pondération des obligations et une surpondération de l’encaisse par rapport à la cible pour profiter de la volatilité du marché et dénicher les occasions lorsqu’elles se présentent. Stratégiquement, il est encore trop tôt pour adopter un positionnement défensif en vue d’une fin de cycle. La turbulence que traverse actuellement l’économie mondiale s’apparente davantage à un cycle manufacturier type qu’à une récession. De plus, le degré de détente monétaire étant élevé dans les pays industrialisés, une récession mondiale demeure improbable en 2019 ou en 2020.
États-Unis : surpondération
Notre scénario de base est que M. Trump calibre sa stratégie en vue de gagner un second mandat. Le déclenchement d’un processus de destitution à la chambre va rendre le jeu politique fort intéressant. La politique monétaire, toujours souple, justifiera une autre baisse du taux directeur en 2019, suivie du statu quo pour 2020. Le cycle économique actuel continuera d’être soutenu par la souplesse de la politique monétaire, une demande nationale stimulée par le plein emploi, la croissance des salaires, la stabilisation du secteur manufacturier et la confiance des ménages. Nous continuons de privilégier le marché américain, avec ses secteurs abordables des finances et de la santé, ainsi que ses puissances en croissance (services de communication et technologie).
Canada : sous-pondération
Les sceptiques continueront d’être confondus par la vitalité de l’économie et de la demande au pays. La politique monétaire demeurera souple sur un fond de statu quo jusqu’à ce que la Banque du Canada puisse bien évaluer l’effet combiné du plein emploi, des bas taux d’intérêt, de l’inflation et de la consommation, mais aussi de la situation internationale, sur l’économie. Le dollar canadien (cible : 75 à 77 ¢ à court terme) est une variable déterminante de cette recommandation.
Zone euro : sous-pondération
Le cycle manufacturier touche son creux à court terme pour ensuite amorcer sa phase de reprise. La désescalade des tensions commerciales, la stabilisation de la croissance économique en Chine, la reprise du secteur automobile et une politique budgétaire stimulante insuffleront une bouffée d’air à l’Allemagne et au reste de la zone euro. À l’instar de l’Italie, une récession technique est toutefois envisageable en Allemagne. La politique monétaire demeure expansionniste. Derrière l’Amérique du Nord dans le cycle, la zone euro montre des signes d’amélioration en 2020.
Royaume-Uni : Brexit? Hard Brexit? Soft Brexit? Brexin? Qui sait? La politique anglaise est imprévisible et peut-être l’ultime sport de combat de la planète. Boris Johnson y pousse le pendule politique à son extrême, au point où son frère a préféré la nation à la famille en démissionnant de son poste en septembre. Une élection générale est envisageable et pourrait déterminer l’aboutissement de cette épineuse saga.
Des signes de réconciliation commerciale et d’améliorations du secteur manufacturier pourraient engendrer une augmentation de a pondération des titres d’Europe et des marchés émergents. Nous préférerons y investir avec un léger retard que d’y entrer trop tôt et d’être déçus. Nous attendons donc des signes concrets avant de passer à l’action.
Il y a longtemps que nous voyons d’un bon œil la technologie et les services de communication. Outre la récente sous-performance, nous croyons que les facteurs structurels soutenant ce secteur demeurent en place. Afin d’équilibrer le risque des portefeuilles, nous misons sur les caractéristiques défensives et la valorisation attrayante (contrairement à d’autres titres défensifs) du secteur de la santé. En ce qui concerne le secteur industriel, il produit des rendements honorables depuis quelques années, mais les tensions commerciales ont repoussé certaines commandes et risquent de nuire à ce secteur.
Notre interprétation globale des indicateurs précurseurs d’une fin de cycle (courbe de rendement, indicateurs avancés, écarts de taux, PMI, confiance, investissement, endettement et stocks des entreprises) est encore positive. Hormis le clignotement au jaune de la courbe de rendement, du PMI manufacturier et de l’endettement des entreprises, les autres indicateurs permettent d’envisager une prolongation du cycle.
Ainsi, il faudra faire abstraction des pointes d’angoisse et de volatilité en se concentrant sur la toile de fond économique et les indicateurs précurseurs pour profiter pleinement du cycle d’investissement.
Si l’histoire se répète (cycle manufacturier type : 18 mois de contraction suivi de 18 mois de reprise), l’économie mondiale se stabilisera au cours des prochains mois et amorcera ensuite une reprise. Jamais dans l’histoire une récession ne s’est matérialisée alors que la politique monétaire était aussi expansionniste à l’échelle mondiale, tout comme un marché baissier n’est jamais arrivé en l’absence d’une récession.
À notre avis, la gestion active de vos placements vous permet de maximiser le rendement à long terme. Nous espérons que ces informations vous aideront à mieux comprendre les marchés et nous demeurons à votre entière disposition pour discuter plus longuement de nos stratégies d’investissement. Nous vous réitérons notre engagement à travailler toujours plus fort pour dénicher les bonnes occasions qu’offrent les marchés financiers, de manière à vous aider à réaliser vos objectifs à long terme.
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