« Il n’y a rien de plus difficile à apprendre que l’expérience et rien d’aussi difficile à appliquer »
– Josh Billings
L’année 2022 est désormais derrière nous. Oui, la pandémie est terminée. Les emplois abondent et la croissance des salaires atteint presque un sommet en 10 ans. Il est toutefois difficile de s’en réjouir lorsque l’on considère que l’inflation a augmenté encore plus rapidement. Il y a aussi les hausses de taux d’intérêt décrétées par la Banque du Canada dans l’espoir de ramener la croissance des prix au pays près de la cible de 2 %. Ces augmentations ont eu pour effet de faire reculer la valeur des actifs et les secteurs de l’économie sensibles aux taux d’intérêt. Comme l’actif principal de la plupart des ménages canadiens est leur maison, nombreux sont ceux qui ont vu la valeur de leur actif fondre tout en devant assumer des paiements hypothécaires de plus en plus élevés. Par conséquent, les dépenses de consommation ont ralenti, et elles s’affaibliront probablement davantage tandis que les Canadiens feront tout ce qu’ils peuvent pour conserver leur propriété.
L’augmentation rapide des taux d’intérêt aura causé plusieurs maux de tête aux investisseurs. Ce changement radical aura eu des conséquences majeures sur les obligations à long terme et les actions de style croissance. Les Nasdaq, FANG+ (Facebook, Amazon, Netflix, Google) et Bitcoin, joueurs dominants du dernier cycle et du début de la pandémie, ont connu une contre-performance et sont en baisse de 27 %, de 37 % et de 64 % respectivement.
De son côté, l’indice obligataire canadien a chuté dramatiquement de 11,7 % en 2022 et de -2,80 % en 2021. Notre marché obligataire n’a jamais connu un tel rendement dans les 40 dernières années. Un investissement de 100 000 $ en 2021 dans un véhicule sécuritaire, dans le cas présent sur le marché obligataire canadien, aurait une valeur de 85 500 $ à la fin de 2022. Peu nombreux sont ceux d’entre nous qui ont connu un tel rendement de cette classe d’actifs. Malgré tout, il ne faut pas désespérer, puisque toutes les obligations sur le marché sont garanties à échéance. Elles sont toutes émises à une valeur de 100 $, rachetée par l’entité émettrice à 100 $ à son échéance. Seule la faillite de la société ou du gouvernement qui l'émet pourrait nous empêcher de récupérer le capital investi.
Obligations
La lutte à l’inflation par les banques centrales a bouleversé les marchés obligataires mondiaux. Si, en 2022, les rendements de la classe d’actifs ont été bien en deçà des attentes, les rendements espérés se sont particulièrement améliorés. Il y a au moins une dizaine d’années que nous n’avions pas vu des rendements espérés aussi élevés du côté des obligations canadiennes. Il est désormais possible d’investir dans une obligation de bonne qualité et d’obtenir un rendement qui se situe entre 4 % et 5,5 % pour les 5 prochaines années. Dans un tel scénario, les investisseurs qui s’étaient tournés vers le marché des actions ont de nouveau la possibilité d’investir dans les obligations, tout en étant récompensés pour le faire.
L’efficacité fiscale s’est aussi améliorée. Puisque bien des obligations ont été émises dans un régime de taux plus bas, plusieurs cours se négocient à escompte par rapport aux valeurs nominales (100 $). Ainsi, les obligations promettent non seulement de générer des rendements courants plus élevés, mais elles incorporeront, en plus, une composante gain en capital qui en améliorera implicitement l’efficacité fiscale. Par ailleurs, l’augmentation des taux d’intérêt protégera davantage les investisseurs contre une baisse du marché boursier. Pour toutes ces raisons, nous sommes optimistes par rapport au rendement du marché obligataire pour les deux ou trois prochaines années. Nous avons donc augmenté la portion obligataire de tous nos portefeuilles de placement.
Actions canadiennes (surpondération)
Les principales composantes de la bourse canadienne sont les secteurs financier et énergétique. Il est vrai que notre économie vit un certain ralentissement et que nous entrerons probablement en récession en 2023, mais le secteur bancaire canadien demeure solidement capitalisé et se négocie déjà à 25 % de rabais par rapport à ses ratios historiques. De plus, nos banques versent toutes de solides dividendes et elles sont toujours en mesure de les augmenter d’année en année. Nous continuons à favoriser ce secteur. Nos titres favoris demeurent la Banque Royale et la Banque Toronto-Dominion.
Du côté énergétique, il est vrai que la valeur du brut et celle du gaz naturel ont fléchi, mais le manque d’énergie reste tout de même un enjeu majeur à l’échelle mondiale. Faute de solution de remplacement, les compagnies pétrolières et gazières canadiennes sont bien positionnées pour profiter de cette lacune. Il est vrai que la combustion fossile est un fléau planétaire, mais certaines compagnies ont réellement innové dans la technologie de la capture de carbone et seront même carboneutres d’ici 2025. Comme nous le mentionnons souvent, les voitures électriques prennent tout leur sens au Québec, où 100 % de notre réseau électrique est composé d’énergie renouvelable. Par contre, le reste de la planète dépend encore à 60 % du pétrole pour soutenir sa filière électrique. Pour un habitant de la Californie, il est sans doute plus écoresponsable d’acheter une quatre cylindres que de se promener en Tesla. Compte tenu du manque d’énergie planétaire et du bon dividende de plusieurs compagnies, nous continuons de privilégier le secteur énergétique canadien. Nos titres favoris sont, parmi les sociétés à grande capitalisation, Suncor et Enbridge Inc., et parmi les plus petites sociétés, Arc Ressource, Tourmaline et Advantage Energy Ltd.
Par ailleurs, les titres de services publics et de télécommunications devraient afficher des données très résilientes. À ce chapitre, nous continuons d’apprécier Telus, BCE et Northland Power.
Action américaine (surpondération)
Du côté de nos voisins du Sud, si le ralentissement économique mondial devait aussi entraîner les États-Unis en récession, les bénéfices pourraient bien reculer d’une dizaine de pourcentages, voire davantage. Ce recul serait néanmoins inférieur aux replis moyens des récentes récessions. Contrairement à la situation des contractions précédentes, le marché du travail demeure robuste, le bilan des ménages est sain et la meilleure capitalisation du secteur bancaire devrait réduire l’incidence de l’actuel ralentissement sur la rentabilité des entreprises. Pour finir, un recul des bénéfices de 10 % et la diminution du ratio cours/bénéfice de 16 à 15 fois pourraient amener le S&P 500 vers le niveau des 3 000 points, pour un rendement espéré de -15,4 %. Certes déplaisante, l’atteinte d’un tel niveau pourrait alors représenter l’ultime occasion pour la prochaine décennie! Bien sûr, les titres de croissance seront encore une fois volatiles en ce début d’année et les titres défensifs produiront de bons revenus plus résilients. Il faudra donc rester aux aguets pour prendre les profits et injecter des capitaux dans certains titres de croissance qui seront de vraies aubaines.
Zone Euro et pays émergents (sous-pondération)
Déjà en récession, l’économie européenne souffre directement des conséquences du conflit à ses portes. Des efforts considérables semblent avoir permis à l’Europe de se procurer suffisamment de gaz naturel afin d’être en mesure de passer l’hiver, même si des inquiétudes se manifestent déjà pour la prochaine saison hivernale. Par contre, d’un niveau absolu, la bourse européenne est une aubaine à tous les points de vue et pourrait tout de même nous surprendre avec de solides rendements. Les risques majeurs nous poussent à demeurer prudents.
Malgré les récentes annonces d’allègement des contraintes sanitaires en Chine, la situation est encore loin d’être fluide et durablement sous contrôle. Après un récent rebond stimulé par l’espoir d’un retour à plus de normalité, une grande prudence s’impose.
L’année 2022 aura elle aussi créé son lot d’émotions, l’investisseur prudent ayant écopé plus que l’audacieux. Par contre, les rendements espérés des obligations sont beaucoup plus attrayants que ce que nous avons connu depuis plusieurs années. Ces mêmes investisseurs verront le rendement de leurs placements s’améliorer grandement s’ils gardent le cap et font confiance à leur stratégie à long terme. Comme nous le mentionnons d’entrée de jeu, il n’y a rien de plus difficile à apprendre que l’expérience et rien d’aussi difficile à appliquer. Modifier complètement sa stratégie d’investissement n’est pas l’option à privilégier, même si elle peut sembler celle à appliquer. Soyez assuré que nous demeurons toujours vigilants et que la préservation de votre capital est au centre de nos préoccupations.
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