Cela ne fait que quelques jours que la Banque du Canada (BdC) a relevé ses taux d’intérêt, il est donc beaucoup trop tôt pour savoir comment l’économie va réagir. Cela dit, il pourrait être difficile de déterminer les répercussions sur l’économie pendant un certain temps.
La BdC indique qu’il faut entre 18 et 24 mois pour qu’un changement de politique monétaire prenne pleinement effet. Certains secteurs ont cependant tendance à être touchés plus tôt. La BdC a constaté que le marché du logement et les ventes de biens durables sont les premières composantes du PIB à réagir de manière significative aux hausses de taux d’intérêt. Or, les effets sur le marché du logement ou sur les dépenses en biens durables se répercuteront plus que jamais sur l’économie canadienne.
Bien que la dette des ménages canadiens en proportion du revenu disponible soit largement conforme au niveau d’avant la pandémie, cela masque les différences entre les composantes de la dette. Les Canadiens ont remboursé leurs cartes de crédit et leurs prêts personnels, mais ils ont augmenté leurs dettes hypothécaires résidentielles. Le logement représente également une part beaucoup plus importante de l’activité économique qu’avant la pandémie. Cela signifie que l’économie est davantage tributaire du logement et que la croissance du PIB réel est de plus en plus dépendante de ce secteur.
Au cours des deux dernières années, l’activité économique a également été fortement orientée vers les dépenses des ménages sensibles aux taux d’intérêt tels que les meubles, les appareils électroniques et les électroménagers. Même si les dépenses pour le logement et celles en biens durables seront particulièrement touchées par les hausses des taux, il ne sera toutefois pas facile d’en mesurer les effets.
En raison de la pandémie, les Canadiens ont passé plus de temps et ont dépensé plus d’argent à la maison. Avec le retrait de la COVID‑19, les Canadiens sont maintenant prêts à dépenser moins pour le logement et les biens connexes et davantage pour les sorties au restaurant et les vacances, peu importe l’évolution des taux cette année.
Alors que l’économie émerge de la pandémie, ces courants divergents compliqueront l’évaluation de la BdC sur ce qui influence exactement les mouvements. Les autorités monétaires se demanderont si le marché du logement et les dépenses des ménages en biens durables ralentissent à cause de leurs hausses de taux ou simplement parce que les Canadiens retournent à leurs anciennes habitudes de travail et de vie.
D’autres indicateurs seront aussi limités, mais l’utilisation de l’inflation globale pour évaluer les effets du resserrement monétaire sera particulièrement délicate cette année. Les lectures de l’inflation sont toujours une mauvaise mesure pour évaluer les impacts des ajustements de la politique monétaire, car il s’agit d’un indicateur retardé. Toutefois, l’inflation devrait ralentir au cours de 2022 en raison de l’assouplissement progressif des contraintes d’approvisionnement et de la baisse des prix du pétrole, et non en raison des hausses de taux d’intérêt. En d’autres termes, une inflation plus faible ne devrait pas être une raison pour cesser de relever les taux d’intérêt. En effet, alors que l’économie continuera de se remettre de la pandémie, les pressions inflationnistes sous-jacentes continueront de s’intensifier en arrière-plan, même si l’inflation globale se calme. La BdC devra se concentrer sur ces pressions locales.
Ne soyez donc pas surpris si les responsables de la politique monétaire continuent de relever les taux même si la croissance des secteurs de l’économie sensibles aux taux d’intérêt ralentit ou si l’inflation globale se modère. Les paramètres habituels permettant de mesurer l’impact de la politique monétaire seront moins utiles au cours de ce cycle particulier de resserrement. La BdC devra donc procéder avec prudence.
Par conséquent, après avoir relevé les taux directeurs en avril, les autorités monétaires devraient se donner plus de temps entre les autres hausses de taux attendues d’ici la fin de l’année. Nos prévisions incluent aussi une pause prolongée en 2023 pour permettre à la BdC d’évaluer le degré de resserrement monétaire que l’économie peut supporter.
Par Royce Mendes, directeur général et chef de la stratégie macroéconomique
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