Lettre financière, automne 2018, 45e édition

Les années se suivent, mais ne se ressemblent pas…

Comme gestionnaire de portefeuille, nous devons faire preuve de discernement entre tintamarre et information, et nous concentrer sur l’essentiel : la toile de fond économique et financière, les indicateurs avancés, la rentabilité des entreprises, les perspectives de rendement et les facteurs de risque.

Depuis le début de l’année 2018, le monde roule à deux vitesses : les États-Unis font du surrégime et le reste du monde tourne à bas régime. L’économie américaine carbure à l’octane élevé de politiques budgétaires, fiscales et monétaires porteuses de croissance.

Ralentie par l’appréciation de l’euro survenue entre janvier 2017 et mars 2018, le Brexit et le protectionnisme américain, l’Europe piétine, et son marché boursier affiche des résultats négatifs depuis le début de l’année.

Les transformations sociales effectuées en vue d’accroître la demande intérieure, les réformes structurelles et le protectionnisme américain ralentissent l’économie de la Chine et le rendement de la Bourse dans ce pays est également fortement négatif.

Chiffres au 30 septembre 2018
Indice Niveau 3 mois 6 mois 1 an
S&P/TSX 16,073.14 -0.56% 6.17% 5.87%
S&P 500 ($ US) 2,913.98 7.71% 11.41% 17.90%
MSCI Pays émergents ($ US) 1,047.91 -1.00% -8.78% -0.50%
MSCI Monde ($ US) 2,184.01 5.10% 7.10% 11.85%
Taux de change $ CAN/$ US 0.77 0.76 0.78 -3.40%
Rend. oblig. Canada 2 ans 2.21% 1.91% 1.78% 45.95%
Rend. oblig. Canada 10 ans 2.43% 2.17% 2.09% 15.63%
Pétrole ($ US) 73.25 74.15 64.94 6.59%
Or ($ US) 1,192.50 1,253.16 1,325.54 -6.85%

Au Canada, l’activité économique se porte bien, d’autant plus que l’AEUMC (anciennement l’ALENA) ne devrait pas nuire au dynamisme de ce pays; toutefois, la Bourse canadienne connaît un rendement négatif depuis le début de l’année.

En plaçant l’analyse économique et financière au cœur du processus d’investissement, nous obtenons une lecture positive des perspectives d’investissement sur un horizon de 12 à 15 mois. Le cycle d’investissement traîne en longueur, mais il lui reste encore des ailes. À terme, il sera confronté à la perspective de taux d’intérêt plus élevés et d’une prime de risque conséquente. D’ici là, il continuera d’être alimenté par la perspective d’une croissance soutenue des bénéfices des entreprises, notamment aux États-Unis. À en croire les indicateurs avancés, l’économie américaine sera la « locomotive » du monde pendant encore quelques trimestres.

Les signes d’une récession imminente sont peu nombreux, mais il est difficile d’envisager une forte correction (20 % et plus). Toutefois, les corrections comme celles de janvier et de février et celle que nous connaissons en octobre sont temporaires et de plus en plus fréquentes. Il est important de respecter nos répartitions d’actif, de profiter de cette correction en déployant des liquidités et de laisser la tempête passer. Votre répartition d’actif est conçue de manière à pouvoir traverser les bonnes et les moins bonnes périodes. De plus, il est important de se rappeler que le rendement d’un investissement se mesure sur plusieurs années, et non sur une semaine, un mois ou une année.

Devises

Le dollar américain continuera de profiter du décalage monétaire entre les économies avancées et de la rhétorique commerciale du président américain pour s’illustrer d’ici la fin de l’année. La valeur du dollar canadien continuera d’être influencée par le prix du pétrole et par l’écart entre les taux directeurs du Canada et des États-Unis. Selon le Mouvement Desjardins, le huard évoluera dans une fourchette de 78 à 80 cents américains d’ici la fin de l’année.

Taux d'intérêt

Combinée à l’effet de politiques commerciales protectionnistes, la perspective d’une hausse des salaires et de l’inflation amènera les investisseurs à se rallier aux prévisions de la Fed, causant une hausse généralisée des taux d’intérêt d’ici la fin du cycle actuel. Nous prévoyons qu’à la fin de 2019, les taux des obligations américaines (Treasuries) de 10 ans varieront de 3,75 à 4 % et que les obligations du Canada de 10 ans seront de 2,75 à 3 %. La conclusion d’une entente commerciale aurait pu justifier une hausse un peu plus rapide des taux directeurs canadiens. Dans un contexte de taux obligataires plus élevés, nous prévoyons toutefois que la Banque du Canada demeurera très prudente et agira graduellement. Après une augmentation de 0,25 % le 24 octobre, nous anticipons toujours deux hausses de taux l’an prochain.

Alors que le rythme de croissance surpasse son potentiel et que le marché du travail connaît le plein-emploi, la politique monétaire américaine sera influencée par les salaires et l’inflation. La Fed haussera son taux directeur à 2,50 % en 2018 et pourrait l’augmenter à quatre reprises en 2019, ce qui le porterait à 3,25 %.

Stratégie de portefeuille

Dans l’ensemble, la conjoncture macro-économique est propice à une prolongation du cycle en donnant un énième souffle aux ménages et aux entreprises. L’économie mondiale croîtra de 3,8 % en 2018 et en 2019. Il faudra néanmoins prêter une attention particulière aux consommateurs américains, qui feront face à une hausse des prix des biens importés. L’indice américain S&P 500 continuera de se distinguer, mais il ne serait pas étonnant que l’Euro Stoxx 50 occupe la position de tête en 2019. Au Canada, une phase de rattrapage est à prévoir.

Nous continuons d’appliquer une stratégie prudente à notre gestion des obligations. En parallèle avec l’amélioration des perspectives économiques, la normalisation des taux d’intérêt réduira la valeur des obligations. C’est pourquoi la durée moyenne de nos portefeuilles est de deux ans, de sorte qu’ils risquent peu d’être pénalisés lors d’une hausse.

L’investisseur qui approche de la retraite peut bonifier son rendement en augmentant son exposition aux titres de croissance et en investissant dans les actions privilégiées de bonne qualité. On pourra aussi envisager les obligations à taux flottant, puisqu’elles évoluent en fonction des taux d’intérêt.

L’environnement s’avère peu propice à une surpondération du secteur des ressources naturelles canadiennes. D’une part, le ralentissement de l’économie chinoise et sa querelle tarifaire avec les Américains n’augurent rien de réjouissant pour le secteur. Enfin, le secteur énergétique canadien souffre d’écarts de prix substantiels, d’une incapacité d’acheminer la production vers les marchés et de la méfiance des investisseurs étrangers.

En résumé, les perspectives économiques et financières demeurent favorables aux actions, ce qui entraîne une surpondération des titres technologiques et de ceux qui sont sensibles aux taux d’intérêt.

Répartition géographique

États-Unis
L’économie américaine a connu un rythme d’expansion soutenu de 4,2 % au deuxième trimestre; si la tendance se maintient, le troisième pourrait aussi surprendre par sa vigueur. Autre fait étonnant de ce cycle : la remarquable croissance du secteur technologique dans un contexte de progression relativement faible. Alors que les profits des entreprises technologiques ont nettement augmenté au cours des dix dernières années, la rentabilité des autres sociétés est à peine de retour au niveau d’avant la crise financière. Le rendement supérieur du secteur technologique est également responsable de la bonne performance de la Bourse américaine par rapport aux marchés étrangers.

Canada
Après une croissance d’à peine 1,4 % au premier trimestre, l’économie canadienne a rebondi à 2,9 % au deuxième trimestre. Le secteur bancaire continue de produire de bons résultats, mais l’inquiétude que suscitent les valeurs immobilières et l’endettement des ménages demeure. À court terme, tant que l’emploi tient, la situation reste positive. Pour ce qui est du secteur énergétique, l’incapacité de mettre en place les infrastructures nécessaires pour acheminer le pétrole vers les marchés continue de miner la confiance des investisseurs. Dans cette optique, le marché canadien peut, par moment, connaître des périodes de rendement supérieur, mais, de manière durable, il est plutôt condamné à rester à la traîne. Voilà pourquoi nous adoptons une pondération neutre pour les titres canadiens.

La conclusion d’un accord sur la libre-circulation des biens en Amérique du Nord dissipe le principal risque à court terme sur le marché canadien. Des défis structurels demeurent, mais le TSX pourrait néanmoins tenter une phase de rattrapage.

Europe
Dans la zone euro, la croissance économique s’est stabilisée au deuxième trimestre au rythme de 0,4 %. L’investissement des entreprises est soutenu par des modalités de financement favorables. L’investissement immobilier résidentiel demeure robuste. De plus, la croissance de l’activité mondiale devrait se poursuivre et favoriser les exportations de cette zone. Le contexte politique (Royaume-Uni – Union européenne et Italie – zone euro) et le protectionnisme américain capteront l’attention, alimentant l’incertitude et la volatilité. Les perspectives sont mitigées à court terme, mais il est envisageable que l’Euro Stoxx se distingue plus tard en 2019. Pour le moment, nous maintenons une sous-pondération des actions européennes.

Conclusion

Selon MRB Partners et l’Association des planificateurs financiers du Québec, un investisseur canadien au profil équilibré devrait s’attendre à un rendement nominal de 5 % sur un horizon de dix ans. Ce niveau est nettement inférieur aux gains de 9,03 % et de 6,91 % réalisés par un portefeuille équilibré au cours des cinq et dix dernières années.

D’une part, il faudra composer avec une remontée des taux d’intérêt et une baisse de la valeur des obligations détenues en portefeuille. D’autre part, le contexte économique et financier sera propice à une croissance d’environ 5 à 6 % des principales Bourses. Il faudra optimiser la répartition entre les pays, les secteurs et les styles, mais aussi la stratégie de change. La volatilité est aussi un facteur avec lequel les investisseurs doivent composer et qu’ils doivent apprivoiser, le début du mois d’octobre en est un bon exemple.

Nous espérons que ces informations vous aideront à mieux comprendre les marchés et nous demeurons à votre entière disposition pour discuter plus longuement de nos stratégies d’investissement. Nous vous réitérons notre engagement à travailler toujours plus fort pour dénicher les bonnes occasions qu’offrent les marchés financiers, de manière à vous aider à réaliser vos objectifs à long terme.

Chacun des conseillers de Valeurs mobilières Desjardins (VMD) dont le nom est publié en page frontispice du présent document ou au début de toute rubrique de ce même document atteste par la présente que les recommandations et les opinions exprimées aux présentes reflètent avec exactitude les points de vue personnels des conseillers à l’égard de la société et des titres faisant l’objet du présent document ainsi que de toute autre société ou tout autre titre mentionné au sein du présent document dont le conseiller suit l’évolution. Il est possible que VMD ait déjà publié des opinions différentes ou même contraires à ce qui est ici exprimé. Ces opinions sont le reflet des différents points de vue, hypothèses et méthodes d’analyse des conseillers qui les ont rédigées. Avant de prendre une décision de placement fondée sur les recommandations fournies au présent document, il est conseillé au receveur du document d’évaluer dans quelle mesure celles-ci lui conviennent, au regard de sa situation financière personnelle ainsi que de ses objectifs et besoins de placement.

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