La plupart d’entre nous se souviendront du slogan de la saucisse Hygrade : « Plus de gens en mangent parce qu’elles sont plus fraîches; elles sont plus fraîches parce que plus de gens en mangent. » Le slogan a bien fonctionné pour la compagnie Maple Leaf jusqu’à ce qu’éclate la crise de la listériose provoquée par une bactérie dans leurs usines.
On constate le même phénomène actuellement avec l’investissement dans les fonds qui calquent la composition des indices (investissements indiciels). Les investisseurs n’ont d’yeux que pour l’indice S&P 500, qui affiche un rendement de 14,50 % à ce jour cette année, et pour le Nasdaq, qui affiche 17,90 %. Le Dow Jones, représentant un portefeuille de titres plus conventionnels, ne réalise qu’un maigre 3,90 % jusqu’à maintenant cette année. Plus l’indice du Nasdaq gagne des points, plus les investisseurs ajoutent de l’argent dans les fonds qui s’en inspirent, contribuant à l’euphorie boursière pour l’intelligence artificielle. Est-ce qu’un danger semblable à la crise de la listériose pour Maple Leaf guette l’engouement excessif pour ces deux indices populaires?
Nous pensons que oui, car c’est le titre de NVIDIA (160 % jusqu’à ce jour) en particulier qui crée la distorsion actuelle entre les indices. Microsoft et Apple font partie de l’indice Dow Jones, mais NVIDIA n’y figure pas, d’où le maigre 3,9 % jusqu’à présent cette année. L’effet pervers d’un titre poids lourd qui croît de 160 % en six mois à l’intérieur de l’indice est que plus sa valeur monte, plus le FNB indiciel doit en acheter pour qu’il soit représentatif de l’indice, ce qui se fait au détriment de l’achat d’autres titres. Pour illustrer l’influence du titre de NVIDIA sur l’indice, le S&P 500 affiche un rendement de 14,5 % alors que sa version équipondérée affiche seulement 5 % de rendement jusqu’à maintenant cette année.
Bien que nous ne soyons pas prêts à parier que le titre de NVIDIA s’écroulera au cours des prochains mois, nous considérons qu’il est téméraire d’investir dans ce titre directement ou par le biais d’un fonds indiciel à ce stade-ci. D’une part, le titre se négocie à 75 fois les bénéfices, ce qui sous-tend une croissance des bénéfices d’au moins 20 % pour les 10 prochaines années. D’autre part, la valeur par rapport aux ventes estimées pour la prochaine année financière est de 20 fois les ventes. Une analyse de la firme Bernstein révèle que les titres qui s’échangent à un ratio supérieur à 15 fois les ventes sont habituellement de mauvais investissements. Dans la plupart des cas, Ces titres ont moins bien réussi que l’indice. En effet, leur rendement était inférieur à celui-ci de 18 % sur trois ans et de 28 % sur cinq ans. Imaginez ce qu’il en est d’un titre qui se négocie à 20 fois le chiffre d’affaires futur.
Il y a bien d’autres titres reliés à l’intelligence artificielle qui sont achetés et vendus à des ratios beaucoup plus raisonnables. Taiwan Semiconductor reste un incontournable mondial de la fabrication de microprocesseurs malgré le risque géopolitique. Microsoft, avec sa diversité de produits infonuagiques et son outil d’IA Copilot pour sa suite de logiciels d’affaires, présente un excellent potentiel d’appréciation à long terme.
Un portefeuille de titres équipondérés représente à nos yeux un meilleur choix que l’investissement dans les FNB indiciels. Nous avons fait la preuve, au fil des années, que ce genre de portefeuille tend à faire mieux que l’indice lorsque surviennent des baisses sur le marché. Cela s’explique par les rééquilibrages constants vers les titres défensifs durant les phases de croissance, nous offrant une protection inestimable lorsqu’une crise éclate, comme ce fut le cas pour Maple Leaf.
Nous vous souhaitons un bel été.
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