Le cycle économique est différent de par sa nature (démographie, endettement, productivité, populisme, politique et géopolitique) et le degré d’intervention publique requis pour l’amener vers son potentiel. Il est tentant de s’inquiéter de l’Amérique de Trump, d’un dérapage considérable dans les négociations sino-américaines, des tensions géopolitiques et, pourquoi pas, de la stagnation séculaire.
Stimulée par une action publique très accommodante, l’activité économique mondiale se poursuivra à un rythme modéré en 2019 puis en 2020. Le fait que l’inflation peine toujours à tendre vers les 2 % dans de nombreux pays industrialisés confirme que des forces structurelles (démographie, endettement et productivité) sont toujours à l’œuvre, que le taux neutre monétaire est inférieur aux estimations des banques centrales et que la politique monétaire requiert un degré de souplesse plus élevé qu’habituellement.
Par conséquent, il faut envisager que ce degré de souplesse puisse mener à des bulles spéculatives d’actifs et à des distorsions financières, sans stimuler l’inflation. Si les banques centrales ont pour mandat la croissance économique, le plein emploi et la stabilité des prix, elles y sont presque.
Une cible d’inflation à 2 % est un objectif louable, mais à force d’en parler depuis plusieurs décennies se peut-il que l’évolution des prix soit ancrée autour des anticipations à long terme ? Et si la cible était révisée à 4 % ?
D’une part, les banques centrales devraient expliquer aux ménages, entrepreneurs et investisseurs le bien-fondé de cette nouvelle cible. Outre un risque d’atteinte à sa réputation et à sa crédibilité, il lui faudrait possiblement attendre une génération avant que l’anticipation à long terme passe de 2 à 4 %.
D’autre part, si les banques centrales n’ont pas réussi après une décennie d’interventionnisme soutenu et, parfois même, expérimental à porter l’inflation à 2 %, comment vont-elles faire pour l’amener à 4 % ? Historiquement, elles ont su diminuer la croissance des prix et moduler les attentes à long terme, mais depuis dix ans elles n’arrivent pas à faire bouger l’aiguille vers le haut durablement.
À défaut de quoi, les gouvernements pourraient recourir à « l’argent hélicoptère ». Par exemple, chaque ménage pourrait recevoir un chèque de 5 000 dollars pour acheter des biens et services pendant douze mois. Cette stratégie créerait sans l’ombre d’un doute un « boom » de consommation et une montée des prix, mais qu’est-ce qui arriverait l’année suivante ? À moins d’un nouveau chèque, la consommation et l’inflation se contracteraient.
En somme, il n’y en aura pas de facile ! Il faudra s’y faire, le cycle économique va se poursuivre à un rythme modéré et il sera asynchrone d’un pays à l’autre ; tout comme l’inflation. L’action politique va demeurer accommodante d’ici la fin du cycle.
Quand ? Qui sait vraiment ! Pour le moment, la grande majorité des indicateurs de croissance est positive au tableau de bord. Le cycle économique, ce grand incompris, et le cycle d’investissement, ce mal-aimé des temps modernes, poursuivront sur leur élan. Certes les enjeux géopolitiques dérangent et attisent la volatilité, mais les grands de ce monde s’entendent sur une chose : la continuité du cycle économique au moins. L’année 2020 est charnière pour le président Donald Trump, tout comme 2020-21 pour le président Xi Jinping.
Tactiquement, l’état d’esprit des investisseurs pourrait continuer d’être influencé par une volonté de protéger les acquis de rendement au T1 pendant la période estivale. Les opérateurs pourraient bien mettre en application l’adage « Sell in May and go away » cette année si les relations sino-américaines se détérioraient davantage. L’encaisse et les obligations se distingueraient dans ce contexte. À moins d’un véritable dérapage, nous profiterions de cette réaction exagérée pour éventuellement redéployer de l’encaisse vers les actions.
Stratégiquement, il est encore trop tôt pour adopter un positionnement défensif en vue d’une fin de cycle. Pour le moment, le cycle économique se porte relativement bien, même s’il n’est pas parfait. Pour certains, sa croissance est trop lente et modeste. Est-ce là une raison suffisante pour se préparer pour la fin du cycle ?
Se poser la question c’est y répondre ! Sur un horizon de 12 à 18 mois, nous continuons à recommander une surpondération des actions, une sous-pondération des obligations et un positionnement neutre en encaisse et en placements alternatifs.
Un rendement total supérieur à 4 à 5 % est-il envisageable en 2019 ? Oui ! Il proviendra surtout des actions pour lesquelles la toile de fond est propice à une appréciation d’environ 7 % (incluant les dividendes) et, techniquement, dans une moindre mesure des obligations. En cas de pointe de volatilité, et d’incertitude, elles se distingueront alors que les investisseurs chercheront refuge. Sur fond d’un rythme de croissance de l’économie et des prix supérieurs aux attentes, une normalisation modérée et graduelle des taux est envisageable. Les placements alternatifs contribueront à bonifier le rendement ajusté en fonction du risque du portefeuille, tout comme l’encaisse. L’agilité et l’exécution appuieront la stratégie d’investissement et le rendement total ajusté pour le risque.
Texte tiré de : Valeurs mobilières Desjardins, Le trimestriel, Numéro 24, Été 2019
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